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    J'attendais Heaven au pied de la porte de l'immeuble, debout et en forme comme jamais. Oui, en forme, on peut dire que je l'étais ce matin là, et ceci fut possible grâce à l'aide précieuse apportée par mon pharmacien attitré et préféré, que je n'ai plus besoin de vous présenter. Il avait pu se procurer pour moi ce dont j'avais tant besoin en ce moment, notamment pour elle, pour Heaven.

     

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    Je m'étais mûrement préparé, depuis le début de cette aventure au bout du monde, cette décision avait été arrêtée dans ma tête, de façon précise, bien que je ne sache pas quand je finirais pas pouvoir l'accomplir. Mais les circonstances aujourd'hui, le souvenir de nos aventures à Paris et de mes attaques en Égypte avait ravivé en moi cette envie, ce besoin, cette dernière volonté, celle qu'on ne pouvait que m'accorder. Et Mehdi m'avait apporté la dernière chose qui me permettra de la réaliser, cette chose qui fait de moi cet homme debout devant vous. Cette petite chose, n'était rien d'autre que de l'adrénaline, assez pour pousser mon corps à être normal, le temps d'une journée

     

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    _ Qu'est-ce que tu fais dehors Aaron ? Me demanda Heaven alors qu'elle arrivait de sa promenade avec Inaya. Tu n'es pas censé, je sais pas, rester assis sagement dans un fauteuil, comme tu le fais si souvent.
    _ J'aimerais te parler, seul à seule, et l'appartement n'est pas très secret comme endroit, il y a des oreilles dans tous les coins.
    J'appuyais ma demande d'un sourire rieur, auquel elle y répondit d'un léger rire. Elle acquiesça, me répondit « Eh bien, d'accord », et monta déposer Inaya dans l'appartement avant de descendre quelques minutes plus tard, une expression de curiosité sur le visage, très certainement intriguée par la démarche.

     

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    Je tendis alors la main vers elle, main qu'elle considéra quelques instants avant d'enfin oser la prendre et je la tirai avec moi vers le centre ville, pour le reste de la soirée.

     

    *

     

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    Nous l'avions passée ensemble cette fin d'après midi, à parler de tout, de rien, à s'empiffrer de sucreries, à bronzer sur la terrasse d'un café, à regarder le monde qui nous entourait, tout simplement. Ça aurait presque pu être ce qu'on appelait un rencard si nous n'avions pas été seulement amis. Et alors que nous rentions, que la nuit tombait doucement sur la ville, je lui pris le bras, à quelques pas de l'immeuble, et l'empêchait d'avancer plus loin. Elle se tourna, me toisa, incompréhensive.

     

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    _ Tu te rappelles ce que je t'avais dit à ton anniversaire, ton dernier en Amérique ? Lui demandai-je en jouant avec ses doigts.
    _ Que tu allais mourir et que tu n'aurais pas le temps de manger mes très célèbres et très primés spaghettis bolognaise, expliqua-t-elle en riant.
    _ Et ton cadeau ?
    Elle se concentra quelques instants, prit un air très sérieux, semblant m'imiter et me dit :
    _ « Je t'offre le monde Heaven ».

     

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    Je ne pus m'empêcher de rire à son imitation ridicule de ma personne, rire auquel elle se joint sans peine. Je lui pris alors les deux mains, et la regardai droit dans les yeux, lui parlant le plus sincèrement du monde.
    _ « Ce ne sera pas ton dernier cadeau, il y en aura d'autres ... ».
    Elle se calma, continua de me regarder, cherchant où je voulais en venir. Je baissai la tête, fixait mon regard sur nos mains qui jouaient ensemble, disparaissant peu à peu dans la nuit qui tombait. Tout me semblait tellement plus simple dans ma tête.

     

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    _ « Toi vivante, tu ne seras plus jamais seule, je te le promets Heaven », lui répétai-je.
    _ C'est … c'était quand j'avais peur de ne plus te revoir, sur le bateau qui nous amenait en Europe.
    Je relevai alors le visage, pour la regarder droit dans les yeux. Je vis à son regard qu'elle semblait comprendre où je voulais en venir, malgré ses doutes qui devaient la submerger. Alors j'inspirai, et éclaircis ses doutes.

     

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    _ Il est temps pour moi de tenir ma promesse Heaven. Ton dernier cadeau d'anniversaire, en retard, je veux bien te l'accorder, nous ne sommes pas en janvier après tout. Je veux te donner cette famille que tu n'as jamais eu de ton enfance, je veux te donner cette famille pour qui tu seras la plus importante. Je veux t'offrir cette famille, cet enfant …

     

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    Elle se figea, les larmes roulèrent sur ses joues et s'écrasèrent sur ses lèvres. De longues secondes, nous restâmes là, l'un en face de l'autre, sans bouger. Le visage d'Heaven finit totalement recouvert par les flots, je fis alors un pas vers elle, et l'embrassai juste au dessus des lèvres, voulant cueillir ces quelques larmes. Elle ne bougea pas.

     

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    Je posai alors mes mains sur ses joues, pour en faire disparaître les larmes qui étaient devenues intruses. Elle ne bougea pas.
    Je fis un pas de plus, la prenant dans mes bras et la serrait contre moi. Elle ne bougea pas.
    Je plantai mon regard dans le sien, voulant capter une réponse, une réaction. Elle ne bougea pas.
    _ Tu as le droit de refuser, de me repousser. Ce cadeau, je veux te l'offrir, je ne veux pas te donner un fardeau supplémentaire.
    Elle esquissa un tremblement, un sanglot avant de fondre en larmes sans bouger de sa place, cachant son visage dans ses mains. je ne sus comment réagir face à cette réaction : joie, peine, incompréhension, panique … Alors, doucement je lui pris les mains, que je posai chacune sur mes hanches, et j'approchai mon visage du sien. Elle continuai de trembler derrière ses larmes et je persévérai dans mon approche.

     

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    Mes lèvres à quelques millimètres des siennes, je lui murmurai, le plus tendrement du monde.
    _ Repousse-moi.
    Et sur ces mots, je l'embrassai.