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     Ah oui, autre point de Juliet que je ne supporte pas, et que personne n’aime : elle ne grossit pas, quoi qu’elle ingurgite, et on peut dire qu’elle en ingurgite, et en quantité astronomique. C’est frustrant de la voir là, allongée sur son canapé à se goinfrer alors que nous, on ne peut que la regarder, et imaginer manger de pareilles merveilles.

    _ Ah, bah tu n’as pas été long, me dit-elle sans détourner le regard de son écran de télé.

    _ Un peu plus, et c’est toi que je mangeais, grognai-je en posant les courses sur la table du salon.

    _ Gna gna gna ! l’entendis-je bougonner alors que revenais vers elle.

     

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     Je m’installai sur le canapé à côté du sien, essayant de déterminer ce qu’elle regardait, un dessin animé … Bah c’est beau, ça a vingt quatre ans, et ça passe sa journée sur un canapé miteux, entre les coussins à regarder des dessins animés. Je tourna la tête vers elle, pour voir que visiblement, elle était plongée à fond dans la télévision avec aucun espoir de la voir s’en décoller tant que son dessin animé ne serait pas terminé. J’avais beau essayé de regarder avec elle, ce n’était vraiment pas mon truc, et je laissai vagabonder mon regard dans la pièce, jusqu’à que je tombe sur le bazar de la table de la salle, et auquel je n’avais pas fait attention en posant mes courses. Ne me dîtes pas que …

     

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     _ T’as toujours pas rendu tes créations ? m’estomaquai-je en réalisant qu’il s’agissait de son ordinateur portable qui était sur la table, ainsi que ses carnets.

    _ J’ai le temps, bougonna-t-elle en gardant son regard rivé sur l’écran. Et il est cool mon patron, relax …

    _ Tu vas te faire virer Juliet ! J’ai pas les moyens de te payer ta bouffe, et tu le sais bien, c’est pas ce qu’ils payent là bas ! C’est juste de l’esclavage légalisé !

    _ Mais t’inquiète pas, j’ai le temps, répéta-t-elle.

    _ Si t’es virée, je te fous à la porte, déjà que tu payes pas le loyer …

     

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     Elle tourna vivement la tête vers moi, me lança un regard noir et éteignit la télévision d’un mouvement sec. Je reculai dans le fond de mon canapé pour éviter de me prendre une télécommande, un cendrier, un truc autre, je sais pas moi … Elle se contenta d’aller vers son PC et de reprendre son boulot. Bon, au moins, ma menace avait eu l’effet escompté, j’ai peut-être une chance qu’elle ne se fasse pas virer. Je me relevai alors, et pris la direction de ma chambre sous les grognements de Juliet.

     

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     _ Au fait, pense à ranger tes courses dans le frigo Juliet, ou ton beurre va prendre des pattes !

    Et avant même d’entendre une éventuelle réponse de sa part, je me précipitai dans ma chambre, et fermai la porte quand j’entendis un bruit sourd contre celle-ci … Très probablement un cendrier qui traînait dans le salon, je ne les compte plus. C’était mon cadeau de Noël pour Juliet, pour être sur que je ne retrouve pas des mégots partout sur la moquette, un lot d’une douzaine de cendriers … certains ont déjà fini à poubelle puisqu’elle s’en sert comme projectile, mais une bonne moitié a survécu. Moi je fume pas, où très peu … C’est pas ce que je préfère. Mon truc, c’est pas aussi simple à se procurer que des paquets de cigarettes, ça se fume pas, et c’est pas vraiment légal … Oui, je dis pas vraiment car ça se trouve toujours, suffit de savoir chercher, et d’avoir une bonne ordonnance. Après un grave accident, qui m’a balafré le visage, je suis devenu un drogué à la morphine, et croyez moi, je préférerais encore être fumeur … Drogué à la morphine, croyez moi, c’est pas la joie. Et comme toute bonne addiction dont on peut avoir conscience de son danger, on ne s’en passe pas pour autant. Dès que j’arrête, je me sens partir dans des tourbillons de douleur, qui me broient de l’intérieur. Pour moi, ce n’est pas une simple dépendance bien que je sache que mon addiction crée cette douleur pour signifier le manque, mais sans ma dose, je ne peux pas vivre normalement. Il y a certaines choses dont on n’est pas fier, celle là en fait partie.

     


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     Je me suis allongé sur mon lit, bras derrière la tête et jambes légèrement écartées. Et distraitement, je regarde le plafond blanc au dessus de ma tête en me demandant si je m’en sortirais un jour. Oh, je sais, vous allez me dire qu’il y a des centres pour ça, des cures de désintoxications, des traitements, des addictologues ou que sais-je encore. Mais je n’ai aucune confiance en la médecine. Ce sont qui m’on fait plonger dans cette merde sans me donner la chance de m’en sortir. Ce sont eux qui ont été incapables de doser la morphine comme il fallait pour me soulager. Ils se sont simplement contentés de banales excuses avec un petit « Nous sommes navrés, mais votre morphine a été mal dosée dès votre arrivée, votre douleur est fictive et vous êtes dépendants à cette substance », dans les grandes lignes. Ils m’ont même pas proposé de suivre un traitement, rien, quedal, zéro. On vous rend drogué, mais démerdez vous et portez vous bien ! Qu’ils aillent au diable !

     

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     D’ailleurs, en parlant de diable … Je me redresse tel un ressort sur mon lit et me précipite sur mon PC que j’avais laissé allumer. Celui-ci étant une véritable ruine de l’Antiquité (n’achetez pas de HP les gens, encore moins sous prétexte qu’il a un design du tonnerre … vous vous en mordez les doigts après !), je disais donc, celui-ci étant une véritable ruine de l’Antiquité, il met au moins vingt minutes à se lancer, sans compter les éventuels bugs de lancement. Tandis que je naviguais tant bien que mal sur ma boite de reception de messagerie électronique, je tapai frénétiquement des doigts sur le bureau.

    _ Ah, bah quand même ! soufflai-je quand celle-ci fut enfin ouverte.

     

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     Je scrutai l’écran avec pour objectif de trier ma masse grouillante de mail, à savoir une petite centaine par jour. Une cinquantaine de spams et pubs en tout genres qui passait à la corbeille dès le premier tri. Ensuite, les demandes de clients pour leurs sites web, que je classais dans le dossier : à faire en urgence ! J’aurais aimer rajouter « et bouge ton cul plus vite que ça Jaicen », mais c’était bien de trop long pour le nom du dossier. Après cette première épuration, il ne restait plus qu’une quinzaine de mail, dont seulement trois étaient de ma famille, un de mes parents et deux de ma sœur adoptive. Les douze derniers, je ne cherchais même pas à les ouvrir. Je les regardai, m’indignant devant les noms plus idiots les uns que les autres que leur destinataires avait donné à leur message. Du classique « Vade Retro Satanas » à des plus originaux comme « va te faire mettre par une boîte de Pringles », en passant par de simples « crève charogne ! », « Dieu nous sauvera ! », « Va-t-en démon tentateur ! » … entre autre. Et ils rejoignirent ma corbeille, renommée « à brûler » pour l’occasion.

     

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     Ces mails sont on ne peut plus clairs. Je ne suis pas un ange salvateur, loin de là. Je suis plutôt du genre démoniaque avec des cornes, une queue fourchue (dans le dos la queue je précise, le reste est tout à fait normal !), la peau rouge et une odeur de brûlé. Sauf que je suis blanc, mais on n’est pas à un détail près, hein ? Une fois mon feu de joie terminé, je sortis de ma chambre, timidement, en entrouvrant la porte pour m’assurer que Juliet travaille bien sur sa nouvelle collection, que sa chef lui a demandé.

     


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