•  

    MaJ 22 (1)

     

     _ Delphes ? Répéta Andy, abasourdie, des larmes pointant au coin de ses yeux.

    La jeune femme en face d'elle acquiesça faiblement, se battant avec ses paupières contre ses larmes, les traîtresses qui te vendent à la moindre seconde.

     

    MaJ 22 (1)

     

     _ Mais ... tu ... tu es morte ? Bégaya Andy. On t'as enterrée, j'ai vu ton cercueil, je ... Papa et Maman sont morts, ajouta-t-elle, ne sachant pas quoi dire d'autre.

    _ Oui, je sais Andrée, je l'ai appris il y a quelques semaines, aux informations, ils publient son dernier livre, à titre posthume. Et Eliott ?

     

    MaJ 22 (1)

     

     Andy n'arriva pas à ouvrir la bouche, tout était confus dans sa tête.

    Sa sœur, sa grande sœur, son modèle, celle qu'elle a cru perdue à tout jamais, est là, devant elle, le visage heureux mais couvert de stigmates, souvenir d'années très certainement douloureuses.

     

    MaJ 22 (1)

     

     Alors, pour seule et unique réponse, Andy sauta au cou de sa sœur, des larmes de joie ruisselant sur ses joues. Après tout, elle lui a juste promis de ne plus pleurer, mais des larmes de joie, n'est-ce pas la preuve que l'on continue à avancer ?

    _ Delphes ... tu m'as tellement manquée ...

    _ Toi aussi Andrée, vous m'avez tous tellement manqué ...

     

    MaJ 22 (1)

     

     _ Que ... débuta la brunette en se détachant de sa soeur. Où étais-tu pendant toute ces années ?

    _ Je ... je crois qu'il vaudrait mieux que je t'explique tout ça autour d'une tasse de café, c'est assez long comme histoire ...

     

    MaJ 22 (1)

     

     Andy approuva, faisant entrer sa soeur dans son appartement, s'installant toutes les deux autour de la table de la jeune femme, Delphes détaillant chaque détail de la pièce tandis qu'Andy préparait deux cafés.

     

    MaJ 22 (1)

     

     _ Tu es plutôt bien installée dis moi, sourit-elle.

    _ Hein ? Ah, oui ... ce sont Papa et Maman qui me l'ont loué à l'année ... Je suis à la rue en juin ...

    Delphes se tut quelques instants, son regard se posant sur la batterie, posée dans un coin de la salle.

     

    MaJ 22 (1)

     

     Doucement et le plus silencieusement possible, elle s'approcha de l'instrument, avant de caresser l'objet du bout de ses doigts fins.

    _ Tu joues toujours ?

    Andy se retourna vivement, le regard mauvais.

    _ N'y touche pas !

     

    MaJ 22 (1)

     

     Delphes fit volte face avant de croiser le regard d'Andy qui avançait à toute vitesse vers l'instrument, voulant se poser entre elle, et ce précieux souvenir.

    _ Je ... débuta la brunette ... je ... désolée de t'avoir hurlé dessus...

    _ T'avais certainement une raison, dit-elle en souriant. T'en joues encore ?

     

    MaJ 22 (1)

     

     _ Euh nan, je joue plus. Elle est là en ... souvenir, dira-t-on. Je ne sais plus jouer ...

    _ Je suis sûre que c'est faux, essaye ... dit Delphes, toute sourire.

    _ Nan, Delphes, vraiment ...

    _ Allez Andrée, pour moi ...

     

    MaJ 22 (1)

     

     _ Je ... je peux pas, viens t'asseoir, que tu me racontes ce qu'il s'est passé.

    _ Andrée ... souffla Delphes en s'approchant de la jeune femme. Tu sais que tu peux tout me dire, comme autre fois, je n'ai pas changé en cinq ans, je suis toujours ta grande soeur, celle à qui tu parlais quand ça n'allait pas, alors je t'en prie, dis moi.

     

    MaJ 22 (1)

     

     _ Elle était à lui, dit-elle en souriant. C'était la sienne, personne n'avait le droit d'y toucher, à part moi quand j'étais avec lui ... c'est tout ce qu'il me reste, je veux pas l'oublier, tu comprends ? Si quelqu'un la touche, ce ne sera plus à lui, ce sera à tout le monde ...

    _ Mais ... de qui tu parles ?

    _ De Spencer, dit-elle, le visage illuminé. Il est parti, mais je sais qu'il m'oublie pas ...

     

    MaJ 22 (1)

     

     Andy se retourna et déposa deux mugssur la table blanche recouverte de livres.

    _ Installe toi, dis moi ce que tu as vécu, je suis curieuse ...

    _ Andrée ... Qui est Spencer ?

    _ Mon petit ami, rien d'important. Installe toi, je veux tout savoir.

     

    MaJ 22 (1)

     

     Delphes s'exécuta, ne voulant pas forcer sa jeune soeur tout juste retrouvée à se refermer sur elle même, sentant très bien que cette histoire de Spencer est tout sauf anodine. Mais elle n'est pas là pour jouer les psys.

    Aujourd'hui, elle est là pour elle, pour Andrée, parce qu'elle a trouvé la force de leur demander pardon.

     

    MaJ 22 (1)

     

     ~ Je ne demande pas une seconde chance ~

    ~ Je crie au plus haut de ma voix ~

    ~ Donne-moi raison, mais ne me donne pas le choix ~

    ~ Parce que je referai simplement la même erreur, encore ~

     


  •  

    MaJ 22 (2)

     

     Le lendemain

     

    Sienna le reconnaissait.

    Se morfondre n'était pas la meilleure solution pour oublier sa rupture.

    Il y'en avait des plus appropriés.

    D'abord, se mettre dans le crâne qu'il ne reviendra plus. Ce n'est pas forcément le plus simple. 

    Garder ces quelques mois comme un bon souvenir, le ranger et passer à un autre paragraphes, hop hop hop ! Fini, on oublie, on le range dans le fond du tiroir à chaussettes !

     

    MaJ 22 (2)

     

     Elle avait donc décidé de démarrer du bon pied.

    Elle s'était levée, comme tous les matins, avait allumé son PC, comme tous les matins, avant d'avoir l'agréable surprise d'être tiltée sur MSN.

     

    MaJ 22 (2)

     

     _ Il tombe bien celui là, marmonna-t-elle en s'asseyant devant son ordinateur portable, pour entamer la conversation.

    Keningston.

     

    MaJ 22 (2)

     

     Kenny dit : Bonjour toi, c'est pas souvent que tu es connectée. Ca va ?

    Sienna_nouveau départ dit : Oui oui, et toi ? Tu fais quoi de beau ? :o

    Kenny dit : Rien du tout ... Je devais avoir Killie, mais elle est avec sa mère ... ce sera pour la prochaine fois :)

    Sienna_nouveau départ dit : Je peux passer te voir ? Je tourne en rond dans mon appart' sinon...

    Kenny dit : Pas de problème ... je t'attends.

    Sienna_nouveau départ dit : Merci, t'es un chou. J'arrive.

     

    MaJ 22 (2)

     

     Elle se déconnecta, attrapa son sac en vitesse avant de descendre les marches de son immeuble, en direction de la rue, pour héler un taxi, direction : chez Keningston.

     


  •  

    MaJ 22 (3)

     

     _ Tu te rappelles de Jason ? Demanda Delphes à sa soeur cadette.

    _ Oui, celui qui m'avait piqué ma soeur, je risquais pas de l'oublier celui là. Pourquoi tu me parles de lui ?

    _ Parce que c'est lui qui m'a enlevé. Je vais tout te raconter ...

     

    MaJ 22 (3)

     

     Andy fixa toute son attention sur sa soeur, ne voulant pas louper une seule seconde ce qu'elle allait lui dire.

     

    MaJ 22 (3)

     

     _ Tu te rappelles de cette nuit là, le soir où j'ai disparu. J'avais rendez-vous avec Jason ... Je crois que j'aurais mieux fait de t'écouter et de lancer la console de jeu, je n'aurais pas autant souffert.

     


  •  

    ♫ Stay - Miley Cyrus

     

    MaJ 22 (4)

     

     Cette nuit là, on devait aller au cinéma, Jason et moi. Restaurant, cinéma, et il devait me ramener à la maison avant minuit, avant que les parents ne crisent.

    Sauf que ce n'était pas vers le centre ville qu'il me conduisait, il conduisait à vite allure en dehors de la ville, je commençai à paniquer, à lui demander où on allait, mais il restait stoïque, riant parfois de mes tentatives pour l'arrêter.

     

    MaJ 22 (4)

     

     _ Arrête Jason, le suppliai-je. Je t'en prie, qu'est-ce que tu fais ?

    _ ...

    Il ne disait rien, riait, mais étrangement, je sentais toute l'hypocrisie qui émanait de lui, son rire n'était pas franc, ses yeux le trahissaient constamment. J'espérais qu'il me faisait juste une surprise, de mauvais goût, certes, mais juste une surprise, qu'à minuit, je sois dans mon lit, à la maison.

     

    MaJ 22 (4)

     

     Finalement, il stoppa la voiture dans une rue vide, entourée de grands bâtiment en pierre, plutôt vétuste, je me sentais pas du tout rassurée. Quand je voulus ouvrir la portière, je constatai qu'elle était fermée, maudite sécurité enfant.

     

    MaJ 22 (4)

     

     Jason fit le tour du véhicule, ouvrit la porte pour m'en sortir sans aucune décence, tirant sur mon poignet. Il m'a limite tordu le poignet, et je n'avais pas la force suffisante pour me sortir de sa poigne, je me débattais comme je pouvais, et il m'assena un coup sur le crâne.

     

    MaJ 22 (4)

     

     Le reste devint flou, je ne sais pas ce qu'il s'est passé.

    Je me vois tomber au sol, sentir l'asphalte à l'arrière de mon crâne, du sang coulant le long de mes joues, il m'avait ouvert l'arcade.

    Je me rappelle d'un léger balancement aussi, peut-être m'avait-il porté sur son épaule, tel un sac à pomme de terre, je ne sais pas ...

     

    MaJ 22 (4)

     

     Toujours est-il que je me suis réveillée dans une pièce que je ne connaissais pas, allongée sur un matelas sale, taché de sang. La carcasse en fer du vieux lit étant branlante, et le moindre mouvement brusque pouvait tout envoyer au sol.

     

    MaJ 22 (4)

     

     J'étais nue aussi, pas la peine de chercher plus loin ce qu'on m'avait fait.

    Des vêtements trainaient dans un coin de la pièce, je me serais bien relevée pour les attraper, m'en vêtir mais je n'osai pas bouger, tétanisée par la peur.

     

    MaJ 22 (4)

     

     Je me suis alors recroquevillée sur moi même, genoux entre mes bras, enfouissant ma tête dedans.

    J'avais froid, mais je m'en fichais.

    Quelqu'un pouvait débarquer, me voir ainsi, peu m'importait.

    Je voulais juste fermer les yeux, rentrer à la maison, chez moi.

     

    MaJ 22 (4)

     

     J'entendis des bruits de pas, mais je ne bougeais pas, toujours recroquevillée sur moi même.

    _ Habille toi, me dit la voix.

    Une voix grave et masculine, enrouée, sûrement par le tabac. Je ne bougeais pas, toujours dans cette position qui me semblait la plus protectrice.

     

    MaJ 22 (4)

     

     _ Habille-toi, j'ai dit, reprit la voix. Ou c'est moi qui le fait. Je reviens dans deux minutes, t'as intérêt à être vêtue.

    Il sortit, le pas lourd et saccadé tandis que je relevais la tête.

    Finalement, je me levais, et attrapait le survêtement qui était posé pour moi, avant de m'en vêtir.

     

    MaJ 22 (4)

     

     


  •  

    MaJ 22 (5)

     

     Je sais pas combien de temps j'ai vécu là-bas.

    Maintenant, je sais que ça fait cinq ans, mais quand tu es enfermée dans une chambre minuscule, avec aucun contact avec l'extérieur, tu ne sais pas quel jour tu vis.

     

    MaJ 22 (5)

     

     De temps en temps, j'avais de la visite, mais pas de celle que j'espérais.

    C'était toujours des salauds en manque qui abusaient de moi.

    Finalement, je n'étais qu'un genre de poupée pour eux.

     

    MaJ 22 (5)

     

     Ils venaient dans ma chambre, faisait ce qu'ils avaient à faire avec moi, parfois même à plusieurs, puis me laissaient sur le sol, humiliée, anéantie.

    Mais dans tous ces visages, je n'avais jamais vu Jason, ou l'homme qui m'avait ordonné de m'habiller.

     

    MaJ 22 (5)

     

     Je ne peux pas te dire à partir de quand, mais Jason est venu me voir.

    Il avait changé.

    Ses cheveux d'ordinaire noirs était parsemé de mèches blanches, il n'avait plus ce visage sombre et froid que j'avais connu, qui m'avait fait craqué.

     

    MaJ 22 (5)

     

     _ Pardonne moi Delphes, me dit-il en s'asseyant à côté de moi. Je ... je sais pas ... pourquoi est-ce que j'ai fait ça ?

    Il enfouit sa tête entre ses mains, des larmes coulaient le long de ses joues, et moi, je restai recroquevillée sur mon lit.

     

    MaJ 22 (5)

     

     Nous sommes restés comme ça des heures durant, Jason avait une montre

    Je voulais qu'il parte, je voulais être seule, je voulais mourir, loin de lui.

    Mais il n'en avait pas l'intention.

     

    MaJ 22 (5)

     

     Il est revenu plusieurs fois, toujours s'asseyant sur ce qui me servait de lit, et au fil des jours, sans que nous nous parlions, je quittai ma position de repli, je le détaillai, j'essayais de me rappeler nos moments ensemble, à quel point j'étais amoureuse de lui.

    De fil en aiguille, je ne le haïssais plus.

     

    MaJ 22 (5)

     

     Il était le seul qui venait me voir, pour moi, et non pour un commerce. Qui venait me parler, même si ce n'était que bonjour et au revoir, deux heures plus tard.

    J'aimais sa présence, ce qu'il faisait pour moi.

    Certains vont parler du syndrome de Stockholm quant à mon affection pour lui.

    Je ne pense pas.

     

    MaJ 22 (5)

     

     Parce qu'il n'était pas violent avec moi, il était naturel, comme avant.

    Et ça ne m'étonnait pas de retomber amoureuse de lui, au fil des jours.

    Parce que finalement, je n'avais que lui, lui et lui seul.