Dans la matinée, à quelques rues de là.

Deux jeunes gens étaient enlacés sur leur lit, riant comme des enfants, voulant profiter de ce jour férié comme il le fallait, à savoir, à ne rien faire, jouer à la limace, peut-être regarder un film, et encore ...

Moins ils se décolleraient l'un de l'autre, mieux se serait, à leur humble avis.

 

 

 Après tout, ils étaient tout aussi bien là, au chaud dans les bras de l'autre, plutôt que dehors à affronter les coups de vents glacés comme la majeure partie des gens, qui sont partis rendre visite à des proches, histoire de se voir pour la bonne année.

La bonne année, c'est vrai qu'il faudrait peut-être qu'ils aillent la souhaiter à leurs proches, ou du moins, ceux qui sont dans le coin.

 

 

 Décidée, Sienna se leva brusquement, s'extirpant des bras de Mathieu, avant de s'asseoir sur le lit, vite rejointe par ce dernier, son visage exprimant l'incompréhension la plus totale.

 

 

 _ Bah, Sienna ? T'as reçu une décharge ou quoi ?

_ Non, juste que ... c'est le nouvel an. On devrait peut-être aller voir Andy, Nate et Willou, tu crois pas ? Akira et Carmen aussi peut-être ...

_ Oublie pas Yann alors, dit-il en souriant.

_ C'est qui celui là ?

_ Un collègue de travail ...

_ Tu veux pas m'en dire plus, dit-elle en s'allongeant sur son homme.

 

 

 _ Bah, il a bossé avec moi sur l'affaire des parents d'Andy. Il s'est occupé de l'enlèvement d'Eliott ...¹

_ Le pote de Marion là ?

_ Non, un autre. On a fait l'école de police ensemble, mais il a arrêté, et s'est reconverti en détective privé ... Dans le cadre de l'affaire Thatch, on a bossé ensemble, il venait souvent me voir à l'appart, Akira était là ...

 

 

 _ Akira, grimaça Sienna.

_ Quoi ? Tu sais très bien que tu n'as rien à craindre d'elle Sienna, rit-il en regardant la jeune femme dans les yeux.

_ Je sais, mais ... il est toujours question d'elle, tout le temps ...

Matt soupira avant de faire basculer la jeune femme sous lui et la forcer à le regarder dans les yeux.

 

¹ Ce Yann là =) Le monsieur à qui on ne voit que les jambes, c'est Matt. Qui avait trouvé ? :o

 

 

 

 _ Sienna ...

_ Mmmh...?

_ Tu stoppes de bouder ?

_ Non.

_ Dommage, je te la donnerais pas alors... dit-il, mimant le dépit.

_ Donner quoi ?

_ Tu boudes, je ne te dirais pas.

_ Je boude plus alors, dit-elle en souriant. C'est quoi que tu veux me donner ?

 

 

 _ Rien d'important ...

_ Oh non, Matt, t'es pas sympa là.

_ Sienna ...

_ Oui ?

_ Voilà, ça fait six mois qu'on est ensemble, que c'est juste parfait, et ...

_ Et ? Insista la jeune femme, se doutant très bien de ce que son compagnon allait lui demander.

 

 

 _ Tu accepterais de passer la fin de tes jours auprès d'un mec totalement HS et idiot ?

_ HS ? S'étonna la jeune femme.

_ On peut pas dire qu'avec un seul poumon, je sois pas au meilleur de ma forme, je suis plus aussi endurant ...

_ Crétin !

_ Tu ne m'as pas répondu ...

_ Tu ne m'as pas posé ta question le mieux du monde non plus, rit la rouquine.

 

 

 _ Madmoiselle Sienna Churge née Knight, me feriez-vous l'immense honneur de m'épouser, de vous installer définitivement avec moi, et d'être, si l'opportunité se présente, la mère de mes enfants ?

_ Tout ça ?

_ Oui.

_ Et des enfants en plus. On voit que c'est pas toi qui devra les porter ... Un serait suffisant.

_ On n'aura qu'à se débrouiller pour avoir des jumeaux, dit-il en riant.

_ Je ne me vois pas donner naissance à deux mini Matt, imagine le carnage, on va se faire liquider en trente secondes ...

_ Surtout s'ils tiennent de toi, rit Matt, malicieux.

 

 

 _ Nous voilà à parler gosses, alors que ce n'était pas la raison première de notre discussion.

_ Oui, mais c'est une éventualité, tu ne crois pas ?

_ Seulement si je réponds positivement Matt.

_ Je vais commencer à baliser, il est affreux ton suspense là !

_ Matt ...

_ Oui ?

_ J'accepte de devenir Madame Philips, sans aucune hésitation. Après pour les marmots, attend un peu mon tout beau ...

_ Les ?

_ Oui, après tout, je vais peut-être me prendre au jeu.

 

 

 

 Quelques semaines plus tard.

Tribunal de grande instance.

Dix heures du matin.

 

 

 _ Après délibération du jury, Harry Ronald Mayers, quarante neuf ans, vous êtes condamné pour homicide involontaire sur la personne d'Emina Mary Mayers, née Connors, et pour trafic de stupéfiants. La cour vous condamne à vingt ans de prison, ainsi qu'à verser une amende aux proches de la victime.

 

 

 Debout à côté de son avocate, Harry jubilait. Vingt ans de prison, c'était peu, finalement. Il se doutait bien qu'il allait en sortir avant. Quand à cette amende, c'était de la menue monnaie, il s'était remplie les poches avant, en cas de coups dur.

Mais le plus important pour lui, faute de preuves, l'accusation pour le meurtre de Paul et Claire Thatch n'avait pas été retenue contre lui, et jamais il ne remercierait assez son avocate d'avoir souligné cela, Harry ayant bien évidemment nié tout rapport avec l'accident, ayant un alibi en béton, parfaitement ficelé, pour ce soir là.

 

 

 De l'autre côté de la grande pièce verte, Akane se gonflait de dépit. Elle avait tant de témoignages contre lui, pour la mort du couple Thatch, mais tout de suite démonté à coups de « mon client ne pouvait avoir fait ça » de la part de sa rivale, et pourtant collègue, Minaya.

Et elle savait bien qu'elle ne serait pas au bout de ses surprises avec cet homme là. En même temps, elle ne le niait pas, son argumentation n'était basée que sur des témoignages hasardeux, celle de Minaya beaucoup plus fournie en preuve.

 

 

 Zupprika se leva, avant de sortir de la salle d'audience, désormais vide.

Bien qu'elle devait faire preuve d'impassibilité et d'objectivité, elle doit avouer que si ça ne tenait qu'à elle, de son propre jugement personnel, elle l'aurait bien condamné à perpétuité, mais elle ne peut pas mêler son jugement personnel, à celui qu'elle doit rendre, de façon objective et juste.

Pourtant, on ne peut pas dire que ça ne la démange pas.

 

 

 Enfin bon, en vingt ans, d'autres preuves pourront s'ajouter, afin de relancer l'enquête.

Il est toujours possible d'espérer.

 

 

 

 On ne peut pas dire que la journée ait bien commencée pour le jeune homme.

C'est en effet tout le contraire qui venait de se produire, sa hantise venait de se réaliser. Ce matin, de bonne heure, et avec un commun accord de la part des deux jeunes gens, Andy avait fait un test de grossesse, qui s'était révélé, au plus grand malheur de Nate, positif. Le voilà donc condamné à être père d'un enfant non désiré, et qu'il n'aurait pas les moyens d'élever, soyons honnêtes, l'héritage laissé par Spencer allait bien être dilapidé un jour.

 

 

 Mais le pire pour le jeune homme fut la dernière lubie de sa colocataire.

Elle l'avait lancé comme ça, ce matin, juste avant d'aller à la pharmacie, pendant qu'ils prenaient leur petit déjeuner.

Elle voulait « récupérer » son fils. Parce que finalement, elle se sentait prête. Nate avait beau lui avoir dit que cet enfant n'était pas un jouet qu'on ne voulait plus un temps pour ensuite le reprendre, elle était catégorique, et qu'elle irait à l'hôpital où elle avait accouché, avec ou sans lui, afin de savoir où vivait son enfant, et s'il était possible de l'adopter.

 

 

 Et Nate savait pertinemment qu'elle le ferait, qu'elle irait même à pied à l'hôpital. Il avait donc cédé, et maintenant, il attendait qu'elle eut fini de se préparer, pour partir tous les deux en direction de l'hôpital.

Le jeune homme était pessimiste quand à la possibilité de récupérer l'enfant. Il était né sous X, techniquement, il n'a pas de parents, et se doutait bien qu'Andy ne pourrait jamais le reconnaître comme son fils.

 

 

 Andy sortit finalement de sa chambre, emmitouflée dans un gros manteau rose, une écharpe autour du cou, et de bottes.

_ T'es enfin prête ? Bougonna le jeune homme.

_ Oui, bon, ça va hein. J'ai l'air d'une dépressive ?

_ Non. Mais tu sais que ce n'est pas ça qui va te permettre de le revoir Andy.

_ C'est mon fils, d'accord. J'ai le droit de l'élever !

_ Ton fils, comme tu dis, tu l'as abandonné. Tu crois sincèrement que tu vas t'en sortir ? Oublie pas que tu en attends un autre. Deux enfants à charge Andy.

_ Occupe-toi de tes oignons, Nate.

 

 

 _ J'estime être suffisamment concerné Andy. Cet enfant que tu attends, il n'est pas là par manifestation du Saint Esprit, ok ? Que tu veuilles le garder contre mon accord, c'est un fait. Mais ne dis pas que ça ne me concerne pas, puisque depuis ce matin dix heures, je suis directement impliqué, ok ?

Andy soupira et leva les yeux au ciel. Ca la faisait bien rire qu'il dise ça. Il ne voulait pas de l'enfant, mais maintenant qu'il est là, il veut se mêler de ses oignons. Faudrait savoir ce qu'il veut. Évidemment, elle ne va rien lui dire, au risque de déclencher la troisième guerre mondiale dans l'appartement, mais on ne peut pas dire qu'elle n'en a pas envie.

 

 

 _ On y va maintenant, dit-elle en se dirigeant vers la sortie de l'appartement, ignorant royalement la tirade de son simple colocataire, qui n'avait aucun droit sur sa vie.

_ Oui, on y va, fit Nate en attrapant les clés de la voiture. Je te rappelle juste que ...

_ Je sais Nate, mais j'ai envie d'y croire, alors laisse moi, s'il te plaît. Je me battrai pour l'enfant de Spencer. Il n'aura pas d'autre mère que moi, c'est hors de question.

 

 

 

 _ Je suis navrée, répéta la secrétaire du service de maternité. Mais nous ne pouvons vous donner la possibilité de voir votre enfant, aux yeux de la loi, vous n'êtes pas sa mère.

_ Je vous dis que je veux lever le secret, j'en ai parfaitement le droit, s'emporta Andy.

_ Vous avez laissé une enveloppe à l'enfant, indiquant qui vous étiez ? Un prénom ?

_ Que.... je ..... non, souffla-t-elle dépitée.

_ Je suis navrée, je ne peux rien faire pour vous aider.

 

 

 _ Mais je ...

_ Il s'appelle Spencer, dit finalement Nate sans croiser le regard d'Andy. Il est né le 15 aout dernier, et, dans ses affaires, il a une croix en argent, avec une pierre rouge.

Les yeux de la jeune femme s'ouvrirent en grand, ne s'attendant pas à ça. Et c'était bien la dernière chose qu'elle souhaitait entendre, au sujet de cet enfant.

 

 

 _ Vous voulez parler du petit Spencer ?

_ Oui.

_ Tu lui as donné le nom de son père ? Commença à paniquer la jeune femme.

_ Ce n'est pas le problème pour l'instant.

_ Je ... bégaya la jeune secrétaire, ne savant pas où se mettre.

_ Quoi ? Où est-il ?

 

 

 _ Je suis navrée, souffla-t-elle.

_ Quoi .... murmura Andy, les larmes pointant au coin des yeux.

_ Il y a deux mois, il a fait une crise cardiaque, il est né avec de nombreuses malformations, dont une faiblesse du myocarde. Il a sombré dans le coma, et ...

_ Où est-il ? S'emporta Nate.

_ Je suis sincèrement désolée. Il est décédé la semaine dernière. Je viens de recevoir l'acte de décès.