• - 203 -

     

    Cela faisait plusieurs mois que j'étais retournée vivre à notre appartement, à Aaron et moi. Il n'avait pas été habité depuis deux ans, et son état s'était relativement dégradé. Il n'était pas seulement question de poussière et de manque d'aération, mais un dégât des eaux avait eu lieu, ruinant une partie du mobilier. Entre temps, j'avais racheté l'appartement, ne pouvant être résolue à abandonner ce lieu qui avait abrité les meilleurs moments que j'avais passé avec lui. J'ai du tout refaire, tout remeubler, mais j'avais gardé l'ambiance qui y régnait : chaleureuse, accueillante, et apaisante. Cet appartement avait été un refuge pour nous deux à une période de notre vie où on avait besoin d'être rassuré. Et suite à l'échec de mon mariage, j'avais horriblement besoin d'être rassurée, de me sentir protégée dans ce cocon et de revivre ces moments de paix.
     

     

    - 203 -

     

    Je n'ai été mariée à Florian qu'à peine six mois. Cela avait été extrêmement dur pour moi, de devoir accepter que je n'arrivais pas avancer sans lui alors que je m'accrochais à Florian. Je savais pertinemment que je n'avais pas choisi le meilleur des partis, mais je n'étais plus seule, et j'avais absolument besoin de m'accrocher. Alors on a essayé d'avancer ensemble malgré tout. Il est devenu héritier de la compagnie, et je suis tombée enceinte. Cette grossesse m'avait semblé un cadeau à partir du moment où je l'ai sue, une façon de plus de m'accrocher à autre chose, mon mari étant un bourreau de travail. Mais je n'y arrivais pas, j'ai pourtant tout fait, et une fausse couche à donné raison à mes inquiétudes. Je ne m'accrochai pas à la bonne personne. Quelques semaines plus tard, nous avons signé les papiers du divorce, j'ai gardé mon nom d'épouse pour les formalités, mon alliance et j'ai emménagé ici.

     

    - 203 -


    C'est dans ces moments là que Cathe-Line, est venue me voir un matin, les yeux rouges et les joues striées de larmes. Et elle me l'a annoncé de but en blanc :
    _ Aaron va mourir, il ne reviendra pas.
    J'avais pourtant eu de l'espoir. J'avais pourtant cru qu'un jour, il reviendrait. Que je reverrais sa tignasse rousse passer la porte, que j'entendrais à nouveau ses grognements. Je pensais à nouveau voir sa silhouette assise à la table de la cuisine, un livre d'anatomie cardiaque sous les yeux, en train de griffonner ses notes. Je pensais à nouveau que je le reverrais endormi sous les couvertures, surveillant que son torse se soulevait au rythme de sa respiration. Je pensais qu'à nouveau, je m'endormirais, blottie contre son torse, à écouter les battements réguliers de son cœur. J'y croyais tellement, et elle m'avait tout enlevé, d'un claquement de doigts.
    _ Je dois lui renvoyer une lettre ces jours-ci, si jamais tu avais eu envie de le contacter. Il est en Egypte, au Caire, m'avait-elle dit.

     

    - 203 -


    Alors j'avais attrapé mon bloc notes, et lui ai écrit une lettre. Je serais incapable aujourd'hui de vous la retranscrire, mais ce n'était pas une lettre d'amour, loin de là. Je n'en avais pas le courage. Mais plutôt une lettre remplie de haine, de désillusion, de tous mes espoirs envolés par sa volonté. Je voulais qu'il se rende compte de ce qu'il laisse, de ce que j'avais fait pour espérer son retour. Je voulais qu'il me revienne et qu'il arrête de faire l'imbécile. Je l'aimais, jamais je n'aurais pu accepter le voir ainsi.
    Cathe-Line avait ainsi contacté plusieurs personnes, ses amis que je ne connaissais pas toujours. J'ai su après sa mort que Cory et Enzo avaient participé à cette lettre collective. Et j'ai aussi su, après également, qu'il ne les avait jamais lues, mais qu'au contraire, il les avait toutes froissées et jetées dans le Nil. Parce qu'il ne voulait pas craquer, et venir pleurer dans nos bras … dans mes bras.

     

    - 203 -

     
    Et les jours, les semaines sont passées. Tous les matins je surveillais ma boite aux lettres, ma boite mail, en attente d'une réponse qui ne serait jamais arrivée. Mais ce mince espoir, ce fil ténu qui me liait à lui, je m'y accrochais comme une naufragée s'accrocherait à sa bouée. Et cette raison suffisait à ce que je me lève le matin, à ce que je m'habille et à ce que j'avance.

     

    ♫ Ellie Goulding - Beating Heart

     

    - 203 -

     

    Et une après midi, on toqua à ma baie vitrée. Je m'en rappelle bien, j'étais en train de faire ma lessive, et je me plaignais que j'aurais du la faire bien plus tôt si je voulais la faire sécher au soleil. C'était ce genre de petit détail qui me faisait rire à l'époque, puisque j'arrivais à grogner sur autre chose que moi même. J'avais alors mis ma machine route, m'était débarrassée du superflu et je suis allée ouvrir la baie vitrée. Et il était là.

     

    - 203 -


    Sa tignasse rousse qui flottait au vent, sa silhouette que je n'espérais plus, ses épaules qui se soulevaient selon sa respiration, ses yeux sombres. Il n'avait pas changé, hormis son teint, plus pâle, son visage, plus creusé. Des rides s'étaient même formées entre ses sourcils. Ses oreilles étaient percées, autour de lui flottait une odeur d'aftershave et de tabac. Ses mains étaient devenues noueuses, ses poignets squelettiques et son corps ne ressemblait plus qu'à une carcasse, décharnée, et qui devait être bien pire si je pouvais le voir sans ses vêtements qui devaient sûrement masquer une partie des dégâts.
    Tout le temps que je le contemplais, les larmes envahirent mes yeux, et finirent par me brouiller la vue. Je ne distinguais plus rien, et Aaron était devenu une masse floue et rougeoyante sous mes yeux. Je ne voulais pas croire que mon espoir aussi ténu soit-il avait fini par laisser place à la réalité, à lui, sous mes yeux.

     

    - 203 -


    Et sans réfléchir un instant de plus, je lui ai sauté dans les bras, je l'ai serré aussi fort que possible contre mon cœur, j'enfouissais mon visage dans son cou, humant avec nostalgie son odeur qui m'était tant familière, son odeur, celle que je connaissais et que j'ai longtemps cherché à retrouver. Il avait passé ses bras autour de moi, comme pour se prouver à son tour que moi aussi, j'étais là, qu'il ne rêvait pas. La pression de ses mains sur ma peau m'avait fait l'effet d'un électrochoc, je sentais qu'il cherchait quelque chose d'autre, qu'il cherchait à s'approprier quelque chose, à s'accrocher à son tour à quelque chose. Mes mains essayaient de le parcourir dans son entier, m'assurer que c'était lui, passaient dans ses cheveux, jouant avec les mèches, dévoilant ses multiples anneaux aux oreilles, passant et repassant sur ses sourcils, ses arcades, ses pommettes, ses joues, sa mâchoire. Elles se rappelaient de lui, comme s'il n'était jamais parti, et sa bouche finit par se retrouver scellée à la mienne, comme pour compléter notre étreinte, pour terminer ce qu'on avait commencé.

     

    - 203 -


    Nous étions restés de nombreuses minutes ainsi, parcourant ainsi l'autre du toucher, du regard, mémorisant chaque instant passés ensemble, tout en faisant durer celui-ci le plus longtemps possible. J'avais retrouvé l'autre moitié de ma personne, je n'avais plus besoin de m'accrocher à qui que ce soit.

     

    - 203 -


    On avait repris notre vie d'avant, rien que nous deux dans cet appartement. Aaron était affaibli, je le voyais diminuer un peu plus chaque jour, mais il s'efforçait de sourire, de faire comme si de rien n'était et de faire preuve d'une très grande volonté. Il ne voulait pas que je m'occupe de lui comme on le ferait normalement à une personne mourante, il voulait seulement être indépendant, et vivre avec moi aussi longtemps qui le lui était permis. Alors nous avions repris là où on s'était arrêté. On se chamaillait, on discutait, on riait, on s'aimait. Comme si ces trois ans ne s'étaient jamais écoulés entre nous. J'aurais même pu croire que tout allait pour le mieux, peut-être même qu'il s'en sortait, qu'il guérissait, même si je savais très bien que c'était impossible, j'avais lu tellement d'ouvrages sur le cœur, sur ses maladies. Quelques semaines sont passées, et nous avions passés une journée dans un parc d'attraction, tels deux ados de seize ans, et le soir, nous nous étions endormis l'un contre l'autre, peau contre peau. Cette journée avait effacé toutes mes inquiétudes à son sujet, car j'en étais persuadée : Aaron guérissait.

     

    - 203 -


    Ce lendemain, je m'étais réveillée en sentant les rayons du soleil chatouiller mon visage et réchauffer la peau nue de mon dos. J'avais tourné la tête sur le côté, et Aaron dormait paisiblement, ses épaules se soulevaient tranquillement. Je m'étais glissée contre lui, et lui avait embrassé la joue pour qu'il se réveille en douceur.
    _ Le soleil est déjà debout lui, lui avais-je soufflé dans l'oreille.
    _ J'arrive, m'avait-il murmuré en gardant les yeux clos.
    Je m'étais assise dans le lit, m'était vêtue et de nouveau, je me penchai sur son visage, l'embrassant à la commissure des lèvres. Je le vis esquisser un sourire à ce geste.
     

     

    - 203 -

     

    _ Je t'aime, lui avais-je murmuré.
    _ Je t'aime …
    Tout sourire, je suis sortie du lit, et suis allée, presque sautillante dans la cuisine. J'avais allumé la cafetière, mis le grille pain en marche, sortis bols et couverts . Une courbature me cherchait depuis la veille, j'essayais de la chasser en m'étirant de tout mon long, tout en surveillant d'un œil que le café ne déborde pas. Je l'ai alors éteinte, versé son contenu dans nos bols et la reposai à sa place.

     

    - 203 -


    Voyant que Aaron n'était pas venu me rejoindre, je suis retournée dans la chambre, et je vis qu'il n'avait pas changé de position. Toujours allongé sur le dos, il avait encore sur les lèvres le sourire qu'il m'avait esquissé. Ce qui avait changé, c'étaient ses épaules. Elles ne bougeaient plus. Son torse ne se soulevait plus. Son sourire était resté figé sur son visage.
     

     

    - 203 -

     

    J'étais resté de longues minutes à le regarder, sans réaliser ce qu'il se passait. Je ne bougeais pas, attendant que ses épaules ne se mouvent, que son torse ne se soulève, mais rien n'y fit. Je sentis alors les larmes pointer de chaque côté de mes yeux, je sentais ma gorge gonfler, mes membres trembler, ma voix se briser alors que j'essayais de l'appeler.
    Mais il était parti. Il ne reviendrait plus jamais. Je me suis alors approchée de lui, lui ai pris sa main encore chaude et la portai contre ma joue, tandis que je m'asseyais sur le bord du lit. Je me suis penchée vers son visage, glissant mes lèvres vers son oreille tout en gardant sa main contre ma joue.
     

     

    - 203 -

     

    _ Bon voyage Aaron …

     

    - 203 -


  • - 2014 -

     

    Les mains de Meredith était scellées l'une à l'autre, dans un enchevêtrement de doigts. Ses articulations blanchissaient au fur et à mesure qu'elle serraient ses doigts les uns sur les autres. Ses bras tremblaient, sa voix s'était engourdie et quand je je relevais le visage, je vis que le sien était rougi, des ombres marquées sous ses yeux. Elle était sur le point de pleurer, mais elle se retenait. Elle nous regarda tous les deux, puis son regard se porta sur son fils, qu'elle ne lâcha pas.

     

    - 2014 -


    _ J'ai su quelques jours après l'enterrement que je t'attendais, dit-elle à son fils. J'avais presque vu ça comme un cadeau du ciel, qui me prouvait que Aaron n'était pas mort, mais qu'une partie de lui vivait encore en moi. J'étais égoïste, car je ne me répétais que ceci « Aaron vit en moi ».
    Elle sourit tendrement à son fils, d'une expression presque religieuse, une réelle fascination pour le rouquin.
    _ Mais il m'avait fait promettre quelque chose, à ton sujet, continua-t-elle.
    Cette fois-ci, elle tourna sa tête vers moi, et me regarda, souriante. J'étais encombrée par son regard, je ne savais pas quoi en faire, comment y réagir. Papa lui avait parlé de moi, elle lui a promis quelque chose pour moi.

     

    - 2014 -

     

    _ Il m'a expliqué que Heaven était enceinte, et qu'il était le père. A cette annonce, tu te doutes bien, Mélie, que je n'ai pas été très tolérante. L'homme que j'aimais avait fait un enfant à sa meilleure amie. Alors il m'a fait promettre ceci « Ne la déteste pas ». Il est vrai que je n'ai pas compris les raisons de son geste, ni de ses paroles. Je n'ai pas pu le lui promettre.
    Je la dévisageai, incrédule et bouche bée. Si je m'attendais à ça de sa part …

     

    - 2014 -

     

    _ Et puis, le jour de l'enterrement, j'ai vu Heaven. J'ai vu ses gestes, et j'ai vu qu'elle était étrangement seule dans cette foule. Personne ne s'était approchée d'elle tout du long de la cérémonie. La seule personne qui semblait être avec elle, à ce moment là, c'était toi. Et j'ai compris que sa promesse était « Ne nous déteste pas » plus que celle qu'il m'a formulé. Tu n'es pas née d'un amour physique de deux personnes qui se rencontrent, s'enlacent et s'oublient. Tu es née d'une amitié que ton père n'a jamais pu se permettre de dissoudre, même s'il lui advenait de mourir.

     

    - 2014 -


    Je souris, les larmes aux yeux. Ses paroles faisaient échos à celles que mon père avait dit à Maman pour justifier de sa volonté de me mettre au monde. « De ton vivant, plus jamais tu ne seras seule ». Il ne l'a jamais abandonnée, il m'a simplement confié cette mission de permettre à ma mère de vivre et de garder espoir. Mettre autant d'espoir dans un aussi petit bébé, c'est tellement insensé que cela me fait sourire. Aujourd'hui, ma mère est encore là, plus forte que jamais. Dois-je ainsi croire que j'ai réussi ma mission ?

     

    - 2014 -

     

    _ Et pour moi ? Demanda Emilien en regardant sa mère.
    _ Je pense qu'il est parti sans même savoir que tu existerais, et que tu lui ressemblerais autant.
    Elle esquissa un sourire, empli de fierté pour son fils.
    _ Alors je t'ai caché. Quand j'ai appris ton existence, je suis partie, et tout le monde a fini par croire que j'étais morte de chagrin suite à la mort de Aaron. Tu es né dans la ville où tu as grandi, j'ai pris le nom de jeune fille de ma mère, j'ai jeté mon alliance dans l'Hudson et on a avancé tous les deux.

     

    - 2014 -

     

    Elle se tourna vers moi, en souriant.
    _ Si je t'ai menti la dernière fois au sujet des origines de Emilien, c'est parce que, c'est toi, la fille légitime de Aaron. Il t'a voulu, il t'a mise au monde de manière consciente. Et je ne voulais pas causer plus de tort à Heaven, je sais que pour elle, ce fut dur de choisir de me le « laisser » et de s'éclipser …
    Je la regardais, interrogative, butant sur trois mots « me le laisser ». Elle comprit tout de suite ma question muette et elle reprit.
    _ Il ne voulait pas revenir vers moi. Il ne voulait pas que je m'accroche à lui. Mais elle se refusait l'idée d'être égoïste, alors qu'elle savait que je l'attendais. Alors, elle a détourné son attention, et au lieu de rentrer chez elle, ils sont arrivés chez moi, et elle l'a poussé dans mes bras.

     

    - 2014 -

     

    _ Vous avez revu Maman depuis ?
    _ Non. La dernière fois que je lui ai parlé, cela remonte à vingt ans maintenant. Et je le regrette presque. Je n'ai jamais pu la remercier de ce qu'elle avait fait pour moi. A l'enterrement, nous nous étions évitées. Nous n'avions chacune pas assez de recul pour apprécier l'autre.

     

    - 2014 -

     

    Elle se leva, et nous regarda tous les deux, fière des deux personnes qu'elle avait sous les yeux. Comme si nous étions tous les deux ses enfants, bien que cela ne soit pas le cas. Elle passa son poignet sur ses yeux, voulant effacer ses larmes imaginaires, et nous regarda.
    _ Soyez fiers de ce que vous êtes, votre père n'était pas seulement un homme du nom d'Aaron aux multiples défauts. Il était quelqu'un de très généreux, qui a toujours voulu faire passer ses proches avant lui. Vous êtes la preuve de son amour pour nous, ne l'oubliez pas.
    Et elle partit dans la cuisine, servir le repas du midi.

     

    - 2014 -


    Emilien et moi nous regardâmes. Quelque chose pétillait dans son regard sombre, et il se mit à sourire. A cet instant, il me faisait penser à mon père, adolescent, comme je l'ai vu sur l'une des nombreuses photos que ma mère m'a montré. Il se leva, s'assit à côté de moi et passa son bras autour de mes épaules, et m'attira contre lui, se cachant dans mon cou. Mes doigts s'accrochèrent à ses vêtements, et je ne pus m'empêcher de pleurer. Mais je ne sus dire de quoi : de peur, de tristesse, ou de joie.

     

    - 2014 -


    Peu m'importait, j'étais complète. J'avais de nouveau un père, j'avais découvert un frère. J'étais ce que Aaron avait de plus précieux sur terre, alors je le partagerais avec eux.


  • ♫ Parler à mon père - Céline Dion

     

    - 205 -

     

    Je voudrais oublier le temps
    Pour un soupir pour un instant

     

    - 205 -


    Une parenthèse après la course
    Et partir où mon cœur me pousse

     

    - 205 -

     

    Je voudrais retrouver mes traces
    Où est ma vie où est ma place

     

    - 205 -


    Et garder l'or de mon passé
    Au chaud dans mon jardin secret

     

    - 205 -

     

    Je voudrais passer l'océan, croiser le vol d'un goéland
    Penser à tout ce que j'ai vu ou bien aller vers l'inconnu

     

    - 205 -


    Je voudrais décrocher la lune, je voudrais même sauver la terre
    Mais avant tout je voudrais parler à mon père
    Parler à mon père...

     

    - 205 -

     

    Je voudrais choisir un bateau
    Pas le plus grand ni le plus beau

     

    - 205 -


    Je le remplirais des images
    Et des parfums de mes voyages

     

    - 205 -

     

    Je voudrais freiner pour m'asseoir
    Trouver au creux de ma mémoire

     

    - 205 -


    Des voix de ceux qui m'ont appris
    Qu'il n'y a pas de rêve interdit

     

    - 205 -

     

    Je voudrais trouver les couleurs, des tableaux que j'ai dans le cœur
    De ce décor aux lignes pures, où je vous vois et me rassure,

     

    - 205 -

     

    Je voudrais décrocher la lune, je voudrais même sauver la terre,
    Mais avant tout, Je voudrais parler à mon père...
    Je voudrais parler à mon père...

     

    - 205 -

     

    Je voudrais oublier le temps
    Pour un soupir pour un instant

     

    - 205 -


    Une parenthèse après la course
    Et partir où mon cœur me pousse

     

    - 205 -

     

    Je voudrais retrouver mes traces
    Où est ma vie, où est ma place

     

    - 205 -

     

    Et garder l'or de mon passé
    Au chaud dans mon jardin secret

     

    - 205 -

     

    Je voudrais partir avec toi
    Je voudrais rêver avec toi

     

    - 205 -


    Toujours chercher l'inaccessible
    Toujours espérer l'impossible

     

    - 205 -


    Je voudrais décrocher la lune,
    Et pourquoi pas sauver la terre,
    Mais avant tout, je voudrais parler à mon père

     

    - 205 -

     

    Parler à mon père...

     

    - 205 -


    Je voudrais parler à mon père
    Parler à mon père...


  • - The End -

     

    Et c'est donc ainsi que ce termine This Is War, j'espère que découvrir (ou redécouvrir) cette histoire vous aura plu, en tout cas, je dois avouer que le ré-upload c'est vraiment pas ma tasse de thé : c'est d'un barbant, surtout sur ce genre d'histoire, pour précisions, vous venez de lire presque 500 pages word de Aaron-mania. Pour comparaison, (et je l'ai faite), je dépasse le premier tome de Hunger Games question pages ;)

    Je vais donc vous laisser avec la vidéo de fin, Accidentally In Love, ainsi que les chansons du générique de fin (si j'avais eu le courage d'en faire un). N'oubliez pas d'ailleurs, que la suite des aventures de Mélie et Emilien se retrouve dans Don't Turn Around, donc n'hésitez pas à aller y faire un petit tour.

     

    TIW - Accidentally in Love from ZhuZhu on Vimeo.

     

     

    Nickelback - Far Away

    Nickelback - If today was your last day

    Alexander Rybak - Fairytale

    Mozart l'Opéra Rock - Place, je passe !


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  • (35)

     

    Le soleil perçait au travers des rideaux de la petite chambre sous pente. Le jeune homme s’éveillait doucement, un rayon s’amusant à courir sur son visage encore ensommeillé. Une petite grimace suivi d’un léger étirement suffit à finir de le réveiller. Son regard fixa le plafond en face de lui où miroitaient deux yeux bleus qu’il n’avait pas réussi à oublier depuis qu’ils les avaient vus il y a de ça quelques jours déjà. Et pourtant le reste de son visage avait disparu. Ne restaient que ses yeux bleus et son prénom : Kellan. Il se demandait d’ailleurs comment il avait pu réussir à oublier le reste du visage du nouveau locataire de ses parents, après tout, ils avaient partagé un repas tous ensemble ce soir là. Mais peut-être était-ce autre chose qui l’avait gêné. Cette attirance qu’il avait clairement ressentie mais qu’il trouvait totalement ... anormale.

     

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    Il se redressa légèrement dans son lit pour jeter un regard à la pièce, mais quelque chose entravait ses mouvements. Un poids sur sa poitrine. Il baissa les yeux et se rappela. Il se rappela de la nuit dernière, et de ce qu’il s’était passé. Ce qui n’aurait pas du se passer. Il avait pourtant dit à son meilleur ami qu’il laissait tout ça derrière lui. Mais elle était arrivée plutôt que prévu, avait battu des cils devant lui, s’était rapprochée … et il n’avait pas pu résister quand elle avait posé ses lèvres sur les siennes. Comme il pouvait être faible face à la tentation de la chair ! Il s’était pourtant décidé à tout lui expliquer, à lui parler … pour la millième fois. C’était un peu comme un jeu, parfois lassant, où la séparation se produisait, qu’elle le soulageait d’un poids avant qu’elle ne revienne une autrefois, demandant une autre chance, qu’elle se rattrapera. Comment lui résister quand elle lui fait du charme ? Et cette fois-ci, il n’avait même pas été question de se quereller. Peut-être avait-elle anticipé et sauté à la case réconciliation sur l’oreiller ? N’était-elle plus dupe des manigances de celui qu’elle présente encore comme son petit-ami, son meilleur ami, l’homme de sa vie …

     

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    Il tourna la tête pour la regarder, il passa même sa main gauche dans ses cheveux, jouant avec doucement. Il s’en voulait presque de réagir comme ça quand elle était endormie. Elle était une toute autre personne, il avait peut-être tort d’agir comme il le faisait, se disait-il. Elle ne pouvait pas être si terrible que ça, c’est peut-être à ça que ressemble une relation normale, c’est peut-être lui qui n’est pas normal de ne pas comprendre.

    Son regard fila sur les dessins qui parcouraient le corps de Charlie, se souvenant de chacun. Adolescente, elle ne possédait qu’une étoile sur l’avant bras droit, tout le reste était apparu au cours de leur relation et Xander avait été présent à chacune de leur naissance. C’était son devoir de petit ami d’être présent quand Charlie avait besoin de soutien. Il sait qu’il n’oubliera jamais le visage humain de la jeune femme quand elle se retrouvait en position de faiblesse, après tout, elle aussi est vulnérable. Ce n’est pas une méchante sorcière, ce n’est pas un monstre. Elle est normale, c’est lui qui est bizarre, qui ne la comprend pas, qui ne la soutient pas assez, qui n’est pas un bon compagnon.

    Elle commença à bouger, et Xander, pour éviter une confrontation trop matinale, préféra se tourner doucement sur le côté opposé, voulant lui faire croire qu’il dormait encore. Il n’avait pas le courage de lui parler ce matin.

     

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    Finalement, la jeune femme se réveilla et s’assit en tailleur, toujours sous les couvertures. Xander mimait tant bien que mal le sommeil du juste, un bras replié sous sa tête. Charlie s’étira et chercha l’heure du regard, surprise d’être réveillée aussi tôt alors qu’ils s’étaient couchés tard. A peine sept heures. Elle soupira longuement. Connaissant la maisonnée, les parents de Xander, Zélie et Alexis, ainsi que sa sœur Chloé, ne serait pas réveillés avant une bonne heure, c’est le weekend après tout. Doucement, elle se pencha au dessus de Xander, voulant tenter de le réveiller sans qu’il ne croit que ce soit de sa faute à elle, mais rien n’y faisait, il continuait de dormir. C’est boudeuse qu’elle posa alors ses deux pieds au sol, voulant trouver une occupation pour l’heure qui promettait d’être longue. Elle était dans une chambre de garçon, elle allait sûrement trouver quelque chose, ne serait-ce qu’un magazine porno, après tout, c’est de son âge, et elle, ça l’amuserait. Mais rien de tout ça dans son périmètre proche, elle se rabattit alors sur la bibliothèque en face d’elle, qui regorgeait de livres universitaires, sur le droit. Barbant, mais au moins, elle pourrait tourner des pages pour s’occuper.

    Xander perçut le mouvement de la jeune femme et se douta qu’elle fouillait dans sa chambre, à la recherche de il-ne-sait-quoi. De peur qu’elle ne trouve quelque chose qui risquait de faire exploserune dispute matinale, il commença à se mouvoir pour signaler à Charlie qu’il était réveillé. Elle posa alors le livre qu’elle avait dans la main et se tourna vers Xander qui s’asseyait sur le lit.

     

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    _ Eh eh ! Salut toi ! lui lança-t-elle joyeusement. Je t’ai réveillé ? Je suis désolée, je cherchais de quoi m’occuper …

    _ Salut, répondit très sobrement Xander. Non, je me suis réveillé seul.

    Sujet-verbe-complément était une devise que Xander aimait suivre au bout de la lettre, pas très friand des phrases à rallonge. Il a toujours trouvé ça inutile et ridicule de trop en dire dans ces phrases, il allait à l’essentiel. Sauf avec Emilien, c’était plus facile de s’épancher avec lui, où quand il était contrarié. Mais avec Charlie, ça n’a guère été plus que des phrases simples. Et comme d’habitude, elle prit la mouche, n’aimant guère la rudesse de Xander.

    _ Tu pourrais y mettre un peu plus d’entrain, bouda-t-elle. J’ai l’air de te faire chier, ce n’est pas l’impression que tu m’as donné hier soir.

    _ Parler n’était pas utile hier soir, dit-il finalement après quelques secondes de silence.

    Charlie se rembrunit et fronça les sourcils. Elle n’aimait vraiment pas quand il lui répondait de cette manière tel un homme sortit tout droit du Moyen-Age. Elle avait l’impression d’avoir à faire à un homme sans sentiment.

    _ Si tu n’as pas envie de parler, tu n’as qu’à me sauter dessus !

     

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    Et voilà, c’était parti, elle boudait. Elle avait détourné son visage de celui de Xander et se mordait la lèvre inférieure. La voir ainsi n’allait pas aider le jeune homme dans ses objectifs de la quitter. Il n’aime pas voir les autres dans l’embarras, encore plus si c’est par sa faute, encore plus si c’est elle. Alors, pour une énième fois, il s’excusera et lui promettra de faire un peu plus d’effort pour que leur couple fonctionne, parce que il n’y a rien qui devrait l’en empêcher. Après tout, ils s’entendaient plutôt bien, avaient les mêmes intérêts pour les arts graphiques même s’ils n’aimaient pas les mêmes artistes, ils avaient grandis dans la même ville, avaient parfois les mêmes délires, et même physiquement ils étaient compatibles. Pourquoi alors ça ne marcherait pas entre eux ? Tout était là pour que ça dure, leur problème, c’était lui, se disait-il à longueur de temps. Lui qui ne se sentait pas à sa place, qui avait l’impression de vivre l’histoire de quelqu’un d’autre. Pensait-il peut-être ne pas avoir mérité qu’une fille comme Charlie ne s’intéresse à lui et l’aime ? Alors il devait faire en sorte de la mériter, il devait faire des efforts.

     

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    _ Excuse moi Charlie, finit-il par lui souffler en la regardant. Je ne pensais pas te vexer.

    _ Pas me vexer ? Alors que tu me dis clairement que ça sert à rien de parler avec moi et que me sauter ça te suffit, comment veux-tu que je ne sois pas vexée ?

    Xander lâcha un profond soupir intérieur. Comme s’il avait vraiment envie de parler de ça avec elle ce matin. Il essaya pourtant d’accrocher son regard en baissant un peu la tête pour essayer de croiser ses yeux aux teintes dorées, et elle mordit à l’hameçon.

    _ Je suis vraiment désolé. Ce n’est pas ce que j’entendais par ça. Tu me connais. Je ne parle pas. Peu. Ca ne veut pas dire que je ne t’aime pas.

    Elle redressa un peu la tête à l’écoute de ce « je t’aime » dissimulé qu’elle comprit et que Xander avait su habilement placer sans le lui dire clairement. Il n’a jamais voulu lui dire ces trois mots, il ne les pensait pas encore destinés à Charlie. Il s’arrangeait juste pour qu’elle le croit.

    _ Pourquoi tu m’as dit ça alors ? reprit-elle, toujours un peu hargneuse mais un peu plus apaisée.

    _ Car tu me comprends sans que je te parle. Même si tu penses le contraire.

    Charlie lui sourit, et voilà, le tour était joué. Il lui avait rappelé à quel point elle pouvait être importante pour lui et la dispute s’achèvera de cette manière, enfin presque, car il ne fallait pas oublier le détail important qui clôt chaque dispute : les charmes de la demoiselle.

     

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    Charlie se pencha alors vers Xander, à genoux sur le lit, et passa ses bras autour du coup de son petit-ami. Il ferma aussitôt les yeux, cherchant mentalement un moyen de passer à côté de cette nouvelle réconciliation qu’il n’avait pas envie de terminer de cette manière, enfin, pas vraiment envie. Mais comme il était faible face à elle, il posa malgré tout ses mains dans le dos de Charlie, les passant sous son haut, tandis qu’elle l’embrassait doucement en se rapprochant encore plus de lui. Et alors qu’il s’apprêtait à retourner sous les couvertures avec la jeune femme, une sonnerie de téléphone retentit. Si Charlie en faisait fi, Xander reconnut celle de son téléphone portable et repoussa doucement la jeune femme pour aller décrocher.

     

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    _ Allô ?

    Charlie s’était assise en tailleurs sur le lit, affichant très clairement sa mine des mauvais jour. Non, elle n’aimait pas être contrariée, encore moins dérangée quand elle voulait un peu d’intimité avec Xander. Celui-ci par contre, était étrangement soulagé d’avoir été sauvé par le gong mais il se gardait bien de le lui montrer.

    _ C’est Rob, entendit-il de l’autre côté du téléphone. Je te dérange ?

    _ Non. Un problème ?

    Ce que Xander aimait avec Rob Taylor, c’est qu’il faisait partie lui aussi du club des utilisateurs du sujet-verbe-complément, membre encore plus assidu car il était encore moins bavard que lui. Ça évitait au moins les longues discussions pour ne rien dire, ils allaient toujours à l’essentiel.

    _ Non. Au sujet de l’inscription, on peut se voir une heure avant ? Au café devant.

    L’inscription en question était celle qu’ils espéraient obtenir pour une école réputée dans le design, notamment de personnages de jeux vidéos et d’animations. Il n’y en avait que quelques unes dans le pays, mais une en particulier avait attiré l’attention de Xander : celle de Houlton, dans le Maine. Le Maine, l’état où il était né et d’où provenait la croix qu’il avait au cou, du moins, c’est ce qu’indiquait le coffret.

    _ Pas de souci, ça me donne une heure.

     

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    Charlie comprit bien ce qu’il se passait. Son Jules allait filer en douce, plus ou moins, pour aller rejoindre quelqu’un d’autre. Elle commença à se renfrogner et le fit savoir à Xander par sa plus belle tête des mines peu réjouies. Comme s’il allait avoir le choix de refuser.

    _ Ca t’ennuie que je vienne avec quelqu’un ? Ma copine est en vacances ici, demanda-t-il bien qu’il connaisse la réponse en avance.

    _ Elle peut venir. See ya.

    Et il raccrocha. Xander posa alors son téléphone sur le bureau sur lequel il était appuyé.

     

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    _ On a une heure pour se laver, s’habiller et rejoindre la fac qui est à vingt minutes de bus d’ici. Je te laisse la salle de bain. Je vais en bas.

    Charlie écarquilla presque instantanément les yeux, il avait enfin prononcé plus de deux mots à suivre. Cependant, elle ne se laissa pas avoir par ça, elle voulait savoir.

    _ Et on va y faire quoi à ton université ? questionna-t-elle.

    _ Rejoindre un ami, Robbie. Tu n’es pas obligée de venir, continua-t-il. Mais ta présence ne le dérange pas.

     

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    Charlie se redressa d’un mouvement sec et le regarda.

    _ Je viens ! Nan mais oh, si tu crois m’échapper comme ça, et puis c’est l’occasion de faire du tourisme.

    _ Comme tu voudras, reprit-il. Je t’y paye le petit déjeuner.

    Xander se redressa et prit quelques affaires dans son armoire pour rejoindre la salle de bain du rez-de-chaussée afin de se doucher rapidement. Mais la jeune femme ne l’entendit pas de cette oreille et lui attrapa l’avant bras.

    _ Je ne suis pas contre une douche avec toi, et promis, je garderais le timing, et mes mains dans mon dos.

    D’un signe de tête, Xander lui donna son accord avant de rejoindre la salle de bain, Charlie sur ses talons, continuant de se marteler le crâne que tout était normal, que Charlie agissait normalement, et qu’il n’avait rien à craindre : ce n’est pas une sorcière, ce n’est pas un monstre, c’est une fille.

    Et à cette pensée, à nouveau, il vit deux yeux bleus flotter devant ses yeux. C’est lui qui n’est pas normal, c’est lui qui est un sorcier, c’est lui qui est attiré par ce qu’il ne devrait pas.