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    ♫ The Script – For the first time (Acoustic)

     

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    - She’s all laid up in bed with a broken heart, while I’m drinkin’ Jack all alone in my local bar, and we don’t know how. How we got into this mad situation, only doing things out of frustration. Tryna make it work, but man, these times are hard….

    [Elle reste allongée dans son lit, le coeur brisé, tandis que je bois du Jack (Daniels, whisky) tout seul dans le bar du coin, et on ne sait pas comment. Comment on en est arrivés là, à faire toutes ces choses par frustration. Je fais en sorte que ça marche, mais bon sang, ces temps sont durs ...]

     Emma sourit, les yeux pétillants d’étoiles. Elle ne se lassait jamais de l’entendre chanter, et encore moins de l’entendre chanter ce qu’elle lui avait inspiré. Certaines fois, elle ne se sentait pas méritante de tout ça. Il chantait pour elle, lui écrivait des chansons pour lui dire à quel point il pouvait l’aimer et en retour, elle ne lui donnait rien.

    Alors elle se cambra un peu plus vers lui pour l’embrasser doucement.

    - C’est superbe Georg …

     

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    But we're gonna start by || Mais nous allons commencer par
    Drinkin' old cheap bottles of wine || Boire de vieilles bouteilles de vin pas chères
    Shit talkin' up all night || Parler de rien toute la nuit
    Doin’ things we haven't for a while, a while, yeah || Faire des choses que l’on n’a pas fait depuis un moment
    We're smilin' but we're close to tears || Nous sourions, mais les larmes ne sont pas loin
    Even after all these years || Même après toutes ces années
    We just now got the feelin' that we're meetin' || Nous avons simplement maintenant le sentiment que l’on se rencontre
    For the first time || Pour la première fois
    Ooh
    Ooh
    Ooh

     

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    She's in line at the door with her head held high || Elle attend devant la porte, la tête haute
    While I just lost my job but didn't lose my pride || Tandis que j’ai perdu mon job, mais pas ma fierté
    And we both know how || Et nous savons tous les deux comment
    How we're gonna make it work when it hurts || Comment nous allons nous en sortir quand ça fait mal
    When you pick yourself up, you get kicked to the dirt || Quand on se redresse, qu’on tombe dans la boue
    Tryna make it work, but man, these times are hard || On va essayer que ça marche, mais bon sang, ces temps sont durs

     

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    But we're gonna start by || Mais nous allons commencer par
    Drinkin' old cheap bottles of wine || Boire de vieilles bouteilles de vin pas chères
    Shit talkin' up all night || Parler de rien toute la nuit
    Doin’ things we haven't for a while, a while, yeah || Faire des choses que l’on n’a pas fait depuis un moment
    We're smilin' but we're close to tears || Nous sourions, mais les larmes ne sont pas loin
    Even after all these years || Même après toutes ces années
    We just now got the feelin' that we're meetin' || Nous avons simplement maintenant le sentiment que l’on se rencontre
    For the first time || Pour la première fois
    Ooh
    Ooh
    Ooh
    Yeah

     

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    Drinkin' old cheap bottles of wine || Boire de vieilles bouteilles de vin pas chères
    Shit talkin' up all night || Parler de rien toute la nuit
    Doin’ things we haven't for a while, a while, yeah || Faire des choses que l’on n’a pas fait depuis un moment
    We're smilin' but we're close to tears || Nous sourions, mais les larmes ne sont pas loin
    Even after all these years || Même après toutes ces années
    We just now got the feelin' that we're meetin' || Nous avons simplement maintenant le sentiment que l’on se rencontre
    For the first time || Pour la première fois

     

     

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    Ooh (oh, for the first time)
    Ooh (oh, for the first time)
    Ooh (yeah, for the first time)
    Oh, these times are hard || Oh, ces temps sont durs
    Yeah, they're makin' us crazy || Yeah, ils nous rendent fous
    Don't give up on me, baby || Ne m’abandonne pas ma belle
    Oh, these times are hard || Oh, ces temps sont durs
    Yeah, they're makin' us crazy || Yeah, ils nous rendent fous
    Don't give up on me, baby || Ne m’abandonne pas ma belle
    Oh, these times are hard || Oh, ces temps sont durs
    Yeah, they're makin' us crazy || Yeah, ils nous rendent fous
    Don't give up on me, baby || Ne m’abandonne pas ma belle
    Oh, these times are hard || Oh, ces temps sont durs
    Yeah, they're makin' us crazy || Yeah, ils nous rendent fous
    Don't give up on me, baby || Ne m’abandonne pas ma belle

     

     


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    Robbie et Xander venaient juste de descendre d’un immeuble du centre-ville de Houlton. Plutôt bien placé, celui-ci se trouvait juste à côté d’un parc et à proximité de différents commerces. Ces atouts en faisaient l’appartement idéal pour leur déménagement. Et ils venaient justement de signer le bail de location quelques instants plus tôt auprès de l’agent immobilier. Celui-ci venait à l’instant de les laisser au pied de l’immeuble pour rejoindre son agence, et poursuivre sa journée de travail. Les deux hommes l’avaient donc congédié, et étaient restés au pied de l’immeuble.

    Robbie en profita pour sortir son téléphone portable de sa poche, pour annoncer la nouvelle à sa mère, qui s’était montrée plutôt insistante toute la journée. Agacée d’avoir un rejeton aussi peu bavard, elle craignait que celui-ci oublie de lui confirmer la location de l’appartement. Et elle voulait absolument contacter les assurances, compagnie d’eau et d’électricité assez rapidement pour que son fils ne se retrouve pas à se geler le derrière dans un appartement sans électricité, eau chaude ou chauffage à la rentrée. Il s’éloigna alors de Xander pour téléphoner, laissant celui-ci seul sur le trottoir.

    Mais ça ne dérangeait pas Xander. Il appréciait plutôt la solitude, et surtout en ce moment. Ça lui laissait tout loisir de réfléchir, ou de juste penser. Et depuis quelques jours, il devait dire que ses pensées étaient accaparées par un blond aux yeux bleus. Au début, il lui était impossible de repenser à leur baiser sans avoir soudain une bouffée de chaleur et les joues rouges de honte. Désormais, c’était plutôt la culpabilité qui le rongeait. Il n’avait pas encore eu l’occasion de rappeler Charlie.

     

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    Cette dernière l’avait appelé l’après-midi ou Kellan était passé chez lui « prendre un café glacé ». Mais trop occupé, il n’avait pas entendu le téléphone sonner. Quand il avait finalement retrouvé ses esprits après le départ de Kellan, il était allé vérifier son téléphone et avait constaté avec effroi qu’il avait manqué un appel de sa petite-amie, et qu’il l’avait ouvertement trompée, et sans regret. Depuis, son téléphone lui semblait bien lourd dans sa poche. Il avait été incapable de la rappeler. Il devrait pourtant. Au moins pour mettre les choses au clair avec lui-même. Il ne pouvait pas avoir embrassé Kellan de la sorte et faire comme si de rien n’était avec Charlie. Car plus Kellan se faisait présent dans ses pensées, et plus Charlie s’effaçait.

     

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    Son téléphone vibra dans le fond de sa poche. Il le récupéra par réflexe et regarda le cadran. Il poussa un soupir de soulagement quand il remarqua que ce n’est pas Charlie qui cherchait à le rappeler, mais seulement Kellan qui venait aux nouvelles.

    « Alors ? Comment il est cet appart ? »

    « Mieux qu’en photo. On a signé le bail avec Rob »

    « OUAH ! J’ai le droit à plus que trois mots aujourd’hui, joli progrès :) »

    Xander sourit un peu distraitement. C’était étrange de constater à quel point sa relation avec Kellan s’était largement améliorée depuis l’épisode du baiser. Ils ne sortaient pas ensemble, Xander restait malgré tout campé sur ses positions, mais il avait eu l’impression qu’un mur était tombé entre eux, et qu’il pouvait se permettre plus de libertés. En tout cas, il se sentait bien plus à l’aise à discuter avec lui.

    « Il faudra que tu penses à me filer ta nouvelle adresse »

    « Ah ? Pourquoi ? »

    « Parce que je compte bien passer te voir ! T’as cru quoi là ? Je ne vais pas t’envoyer de carte postale de Bloomington, tu connais déjà je crois »

    « Très drôle … :) »

    « Un smiley ! Planquez-vous, il va pleuvoir !! Bon, sérieux, je te laisse, je dois filer à la fac. Bonne fin de journée ;) »

    « A toi aussi »

     

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    Xander garda ses yeux rivés sur l’écran, comme s’il attendait la suite. Mais après deux minutes sans aucune nouvelle, il dut se rendre à l’évidence que Kellan n’allait pas poursuivre la conversation pour le moment. Alors qu’il contemplait l’inactivité de sa messagerie, il se décida à envoyer l’adresse de son futur appartement à Kellan pendant qu’il y pensait. Et puis comme Rob ne revenait pas de sa discussion avec sa mère, il se dit qu’il devrait peut-être en faire autant et contacter sa belle-mère. Il envoya alors un bref message à Zélie pour lui dire qu’ils avaient finalement signé le bail et que l’appartement leur convenait totalement.

    Toujours aucun signe de Robbie. Xander fit défiler alors ses messages, ses contacts et s’arrêta sur celui de Charlie. Il approcha son pouce du bouton d’appel, mais ne put se résoudre à appuyer dessus. Qu’est-ce qu’il allait bien lui dire ? Il avait pensé commencer par lui envoyer un sms avec un « faut qu’on parle » mais ce genre de message n’était jamais très bien accueilli, et souvent synonyme de rupture. Et elle allait se mettre dans tous ses états, et il n’arriverait pas à lui faire entendre raison. D’un autre côté, elle ne risquait pas de se déshabiller devant lui pour détourner la conversation. Alors même s’il n’était pas très fan de l’idée de rompre par téléphone, il se disait que c’était sûrement la seule solution pour qu’il y arrive. Il prit alors son courage à deux mains, et plutôt que de l’appeler maintenant, car Robbie pouvait revenir d’un moment à l’autre, il écrivit le fameux message. Celui qui allait fiche le bordel dans la vie de Charlie, et dans la sienne aussi.

     

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    « Salut Charlie. T’es libre ce soir ? Je dois te parler de quelque chose. Xan’ »

    Et envoyé. Il rangea aussitôt son téléphone dans sa poche. Il n’avait pas spécialement envie de savoir si Charlie lui répondrait aussitôt, et surtout ce qu’elle dirait. Il espérait que son message n’avait pas été trop violent. Quand bien même il voulait mettre fin à sa relation avec Charlie, il n’avait pas non plus envie de la faire souffrir. Quand il releva le nez, Robbie revint vers lui, grommelant. Apparemment, réussir à partir du domicile familial était quelque chose d’assez laborieux. Mais il se garderait bien de le lui dire.

    - Tu veux manger un truc ? demanda alors Xander en indiquant le carrefour à quel pas de là. J’ai vu un fast-food à l’arrivée.

    - Ça marche. J’ai faim.

     

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    Les deux hommes se dirigèrent en silence vers le restaurant situé à l’angle de la rue. Alors qu’ils s’arrêtèrent au passage piéton pour traverser, une joggeuse blonde prit l’angle de la rue sans regarder sa trajectoire et entra directement en collision avec le bras de Robbie. Celui-ci ne fut pas bousculé par l’apparition, mais la jeune femme tituba avant de retrouver son équilibre et s’empêcher ainsi de s’affaler au sol.

    Ils la regardèrent un instant. Assez grande, avec des très longs cheveux blonds et vêtue d’une tenue de sport constituée d’un short, d’un tee-shirt et d’énorme baskets. Par reflexe, Robbie lui attrapa malgré tout le bras pour l’empêcher de basculer en arrière et de se retrouver sur la route.

    - Eh, ça va ? s’enquit alors le métis.

     

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    La jeune femme releva le nez alors, avec un sourire qui se voulait rassurant. Oui, ça allait très bien. Sauf son nez qu’elle s’était aplati contre le bras musclé du mastodonte qui se tenait en face d’elle, et de son ego qui en avait pris un coup. Elle se massa alors le bout du nez pour s’assurer que celui-ci n’était pas cassé. Ça avait l’air d’aller. Il l’élançait, mais il ne saignait pas. Elle s’en remettrait.

    - Oui, ça va. Merci de m’avoir rattrapée.

    Elle cligna des yeux plusieurs fois quand son regard croisa celui de son sauveteur, et rougit presque instantanément. Non seulement elle avait manqué de se vautrer en public, mais devant un public carrément beau gosse. La honte !

    - Désolée, je ne regardais pas où j’allais. Je ne vous ai pas fait mal ?

    - Non.

    - Ouf, dit-elle alors tout sourire. Je m’en serais voulue, hé hé.

     

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    Elle les détailla un court instant, et réalisa assez rapidement qu’ils n’étaient pas du coin. Houlton était certes une ville plutôt importante, mais elle avait écumé assez de soirées pour avoir une idée du panel des garçons de son âge en ville. Et ses deux-là n’avaient jamais été à aucune soirée ou dans un aucun lycée de la ville, elle en mettrait sa main à couper.

    - Vous êtes nouveaux en ville, je me trompe ? demanda-t-elle aussitôt.

    - Hein ?

    - Oui, répondit Xander. On est étudiants.

    - Ah ! Je me disais aussi que je ne vous avais jamais vus. Et bien, bienvenue à Houlton messieurs. Moi c’est Zhoo !

     

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    Elle leur adressa leur plus beau sourire, tout en restant comme à son habitude, cordiale et bienveillante. Elle adorait rencontrer de nouvelles têtes, et c’était encore plus agréable quand c’était des étudiants qui s’installaient, car ils n’étaient pas juste de passage, et elle pouvait ainsi créer de vraies amitiés.

    - Robbie, répondit le grand brun.

    - Xander. Enchanté.

    - Moi de même.

    Elle leva le nez vers l’horloge au coin de la rue. Elle devait rentrer chez elle pour l’heure du déjeuner, sinon sa mère risque de l’assassiner. Elle essuya ses mains sur son short et se baissa ensuite pour resserrer ses lacets.

    - Bon, Xander et Robbie, dit-elle en se relevant, je serais bien restée bavarder, mais je suis attendue. Je vous dis à bientôt en ville alors.

    Elle leur fit un signe de la main en guise d’au revoir et reprit sa course avant de disparaître à l’angle de la rue suivante. Robbie n’avait pas quitté son regard de la jeune femme entre le moment où elle leur dit au revoir, et celui où elle disparut, ce que Xander ne manqua pas de remarquer. C’était assez drôle à regarder.

     

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    - Tu aurais dû lui demander son numéro, lui dit Xander alors qu’ils reprenaient leur chemin vers le restaurant.

    - Quoi ?

    Robbie se tourna aussitôt vers Xander, en écarquillant légèrement les yeux. Ce qui fit s’amuser encore plus Xander. Il était plutôt habitué à voir Robbie avec un visage neutre. Alors le voir avec cette tête déstabilisée était assez inédit, et donc plutôt distrayant.

    - Je disais que tu aurais dû lui demander son numéro de téléphone. Bon, ce n’est pas comme si on risquait de ne jamais la recroiser.

    Robbie n’ajouta rien et passa devant Xander pour ne plus l’entendre déblatérer ses bêtises. Comme s’il était du genre à demander le numéro d’une parfaite inconnue dans la rue, aussi aimable soit-elle. Et puis, ce genre d’histoire, ça ne l’intéressait clairement pas. Il avait d’autre chats à fouetter, comme réussir ses études. Et ce n’est pas en rencontrant des gens qu’il allait y arriver.

    Xander haussa les épaules face à la nonchalance de son ami. Il était même en train de se demander si ce qu’Emilien lui avait raconté quand il lui avait présenté Robbie était une boutade ou un fait avéré. Son meilleur ami lui avait dit que Robbie avait été amoureux de Mélie, sa demi-sœur, mais qu’il s’était fait voler la place par un autre de leur bande, Priam. Et vu comment il avait l’air de se braquer à l’idée de revoir cette fille, cette pensée ne lui sembla plus aussi improbable.

     

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    Son téléphone vibra dans sa poche, et par réflexe, il le récupéra pour lire son message. Sûrement Kellan qui avait reçu l’adresse. Mais il grimaça aussitôt quand il vit qu’il s’agissait en réalité de Charlie. Il ferma les yeux un instant, le temps d’ouvrir le message. Il devait le lire aussitôt, comme quand on enlevait un pansement. Ça fait mal sur le coup et après ça va mieux. Il ouvrit alors un œil pour y découvrir le message de sa … son ex petite-amie ?

    « Tu veux me plaquer ? Ça ne me surprend même pas. Et bien ok. Ciao »

    Il cligna des yeux à plusieurs reprises. Elle venait vraiment de le plaquer par texto ? Il ne savait pas trop ce qu’il se passait. Mais ce n’était absolument pas prévu que ça se passe comme ça. Il essaierait quand même de l’appeler dans la soirée, pour lui fournir un minimum d’explication, et essayer de discuter. Il n’avait quand même pas envie que ça se termine de cette manière entre eux. Ils avaient été ensemble durant plus de trois ans après tout. Elle avait été sa première petite amie, et sa première pour tout. Ils ne pouvaient pas se séparer comme ça, sur un texto.

    Il soupira alors, verrouilla son téléphone et le rangea dans sa poche. Il l’appellerait ce soir. Du moins, il essaierait.

     

     


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    An prit une très grande inspiration, et expira longuement. Elle jeta un regard à côté d’elle, à la tombe de sa génitrice. Une fois n’est pas coutume, ses pas l’avaient conduite ici. Ça devenait plus qu’une habitude. Aujourd’hui, elle devait retrouver Gabe chez lui, pour qu’ils puissent passer l’après-midi ensemble. Et comme elle avait pris un peu d’avance en partant de chez elle, elle avait finalement fait un détour par le cimetière.

    Gabe. Rien que d’y penser, elle s’empourpra. Après le bal du lycée, elle l’avait finalement accompagné chez lui, et elle n’était rentrée chez elle qu’au petit matin, provoquant ainsi la colère de son père, qui avait explicitement exigé qu’elle rentre avant deux heures du matin. Ce qui ne s’était absolument pas passée. A deux heures du matin, elle dormait profondément dans les bras de Gabe. Nouvel afflux de sang dans ses joues.

    Ils avaient sauté le pas finalement. Et elle ne s’était absolument pas attendue à lui céder un jour. Mais il faut croire que l’ambiance bal du lycée avait fini de lui prouver que Gabe pouvait être plus qu’un ami à ses yeux. Et c’était ça toute la question du moment. Qu’est-ce qu’ils étaient l’un pour l’autre à présent ? Un flou croissant se déployait autour de ses pensées pour l’étudiant en médecine et elle ne savait pas comment faire pour y voir plus clair. Et pour rien arranger, ils n’avaient pas eu l’occasion de se revoir depuis le bal. Ça le faisait donc une semaine que An marinait dans ce flou relationnel.

    Sortir ou ne pas sortir avec Gabe ? Voilà la question qui hantait ses pensées en ce moment.

     

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    - Toi tu serais sortie avec, lâcha-t-elle à la tombe à côté d’elle. C’est bien pour ça que je suis là, non ? Et regarde où ça t’a conduit. Je ne suis pas convaincue du bienfondé de la chose tu vois.

    D’un autre côté, elle ne pouvait pas prendre la vie d’Andy comme exemple. Elle avait des circonstances atténuantes, comme une famille en lambeau, un meilleur ami – petit-ami complètement lâche et l’amour de sa vie était un trafiquant d’armes et de drogue. La seule drogue que Gabe serait capable de dealer, c’est son tube de vitamine C pour survivre en cours. Donc elle devrait plutôt bien s’en sortir. Ce n’est probablement pas lui qui allait la tirer vers le bas.

    Ni vraiment personne d’autre. Ce n’est pas comme si elle avait une foule de prétendants qui se bousculait à sa porte actuellement. Et elle se disait qu’elle serait bien bête de ne pas en profiter. Après tout, la phase de test avait été concluante, et il n’y avait pas eu une seule goutte d’alcool pour enjoliver sa soirée.

    - Bon, allez hop, on n’a qu’une vie, conclut-elle en se relevant. Bye Andy, salut Spenc’.

     

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    Elle s’étira rapidement et sortit du cimetière pour rejoindre le quartier où vivait Gabe à quelques rues de là. Elle y serait en quelques minutes, sans se presser. Un bref coup d’œil à son téléphone lui confirma qu’elle n’allait pas arriver en retard. Elle reçut presque aussitôt un message tout excité de sa meilleure amie, Zhoo.

    « J’ai rencontré un trop beau mec Anie ! OMG ! Je n’en reviens pas ! Tu l’aurais vu ! »

    An esquissa un sourire face à la réaction exacerbée de sa meilleure amie. Dès qu’elle était heureuse, elle n’avait plus de filtre et laissait déborder sa bonne humeur. Si Zhoo pouvait être amoureuse par procuration en regardant le bonheur des autres, elle avait surtout le don d’être contagieuse en matière de bonne humeur.

     

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    « Trop beau ? Parce que c’en était choquant ? »

    « Complètement ! Et je ne lui ai même pas demandé son numéro de téléphone, je suis trop nulle è_é »

    « Tu le recroiseras. Houlton n’est pas si grand que ça. Enfin, s’il habite en ville, hé hé »

    « Méchante ! Et oui, il habite Houlton, il déménage juste. Il s’appelle Robbie aussi, et il est grand, brun, métis, musclé ... OMG ! Je ne vais pas m’en remettre. Donc ben, je ne vais pas pouvoir t’emprunter Gabe finalement. Tu m’excuseras auprès de lui ? ;) »

    « T’inquiète. Je crois qu’il a quelqu’un finalement. Il s’en remettra »

    «  Ah oui ? Quiiiii ? »

    «  Moi ? »

    Elle piqua un fard monumental quand elle envoya son dernier texto. Ce n’était même pas encore officiel avec Gabe qu’elle l’annonçait comme ça à sa meilleure amie. Elle l’imaginait déjà se décrocher la mâchoire, sautiller partout autour d’elle et aller diffuser la nouvelle auprès de sa mère. Il ne manquerait plus que Gabe change d’avis, et elle aurait l’air fine à avoir fait des plans sur la comète.

    « Je veux les détails ! »

    « Plus tard, je dois aller le voir. Mais je te tiens au courant Zhoo. Va donc chercher le numéro de téléphone de Robbie mystère plutôt ;) »

     

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    Elle était arrivée devant l’immeuble de Gabe. Elle lui envoya alors un rapide message pour lui signifier sa présence, puis rangea son téléphone dans sa poche. Une grande inspiration, et elle y allait. Elle fit de grands pas jusqu’à la porte de l’immeuble et grimpa les marches jusqu’à l’appartement. Elle toqua brièvement à la porte, et Gabe lui ouvrit presque aussitôt.

    - Salut An.

     

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    Il était rayonnant, presque éblouissant pour An qui avait du mal à se tirer de son flou. Elle lui rendit alors son sourire, et prit la main qu’il lui tendit, pour le suivre dans l’appartement. Elle l’arrêta aussitôt dans l’entrée, pour l’empêcher d’aller plus loin. Gabe se tourna alors vers elle, interloqué.

    - An ? Il y a un problème ?

    - Aucun, lui dit-elle en souriant. Tu ne m’as juste pas laissé l’occasion de te dire bonjour.

     

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    Elle s’approcha alors de son meilleur ami, posa sa main libre sur l’avant-bras de Gabe, et se rapprocha de son visage avant de finalement l’embrasser. D’abord surpris, Gabe ne resta pas figé bien longtemps. Il enlaça An et la rapprocha de lui pour poursuivre ce baiser qu’elle venait de débuter, et qui lançait finalement leur relation. Il ne pouvait pas être plus heureux qu’en cet instant, en embrassant la fille dont il était amoureux depuis des lustres.

     

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    - Bonjour, murmura-t-elle contre ses lèvres.

    - Bonjour, lui répondit en écho Gabe avec un petit sourire. 

    Il caressa la joue de An du bout des doigts, tout en la regardant dans les yeux. Il n’avait pas besoin de lui demander ce qu’elle avait décidé. Ses yeux parlaient pour elle à cet instant précis : elle avait finalement décidé de faire évoluer leur relation. Et il fera tout pour qu’elle n’ait pas à regretter son choix.

     

     


  • (68)

     

    Quelques jours après son entrevue avec Eliott Thatch, Yann Leiner avait convoqué ses deux acolytes, et meilleurs amis, à son cabinet de détective afin de faire le point sur la situation. Car depuis la libération de Harry Mayers il y a quatre ans, les trois comparses avaient continués, à leur niveau et dans leur domaine de compétences, à glaner des informations sur Mayers et ses malfrats. Et cette fois-ci, la pêche avait été bonne pour Yann. Il espérait que ce soit également le cas pour Matt et Akira.

    Il terminait alors de consigner ses découvertes dans son ordinateur quand la porte d’entrée sonna. Il se leva alors de son bureau, traversa la pièce et rejoignit la porte d’entrée de son appartement – où se trouvait donc son cabinet – pour aller ouvrir. Derrière la porte, Matt et Akira, comme convenu. Yann se décala alors pour les laisser entrer, et ils se dirigèrent tous les trois ans le bureau de Yann après s’être échangés les politesses de circonstances.

     

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    - Tu as eu du nouveau ? demanda Akira une fois qu’ils furent tous installés dans le cabinet. Je n’ai pas avancé d’un iota de mon côté et ça devient frustrant.

    - Oui, j’ai réussi à parler à Eliott, en tête à tête. Et c’était plutôt enrichissant.

    - Ah oui ? s’interloqua Matt. Et qu’est-ce qu’il t’a dit d’intéressant ?

    - C’est plutôt ce qu’il ne m’a pas dit qui était intéressant Matt.

    Il s’appliqua alors à leur raconter l’entrevue, sans omettre le moindre détail. S’ils voulaient espérer avancer sur cette affaire, ils devaient tous les trois en savoir le plus possible. Yann leur raconta ses deux semaines de filature et ce qu’il avait pu constater au domicile des Thatch, jusqu’à départ de Faith Thatch du domicile conjugal. Il décrivit alors la tenue d’Eliott ce jour-ci, son regard perdu, sa coiffure désordonnée, et l’amoncellement de dossiers sur les tables et bureau. Et il retranscrit leur conversation, presque mot pour mot.

    Après ce compte rendu précis, Matt écarquilla légèrement les yeux. Ils n’avaient pas besoin de plus d’éléments pour en être convaincus. Cela ne constituait pas de preuve bien évidemment. Rien de tout ceci n’aurait de valeur devant un juge, mais ces éléments leur étaient indispensables pour savoir où chercher les preuves dont ils avaient besoin.

    - Donc Mayers manipule Eliott en menaçant sa femme. Je ne comprends pas comment on a pu passer à côté de ça …

     

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    - Ah ! la coupa aussi Matt. On y a pensé. Moi j’y ai pensé, mais vous n’aviez pas voulu me croire car rien ne semblait coïncider. Il va falloir cesser de douter de mon flair.

    - Tout doux Stevie. Apprends donc à respirer avant de parler de flair, rétorqua Yann.

    - Sérieux ? Tu viens vraiment de m’appeler Stevie ? Tu sais plus quoi inventer, il va vraiment fal…

    - Les garçons ! les coupa aussitôt Akira. On n’est pas là pour débattre de l’originalité des surnoms que te donne Yann, Matt. Donc revenez sur le sujet de fond, merci.

    - Oui M’dame, bougonna Mathieu. Donc on a la preuve, par la non preuve, que Mayers menace Thatch par le biais de sa femme. Celle-ci n’est plus en ville depuis quelques jours, et tu as la preuve formelle qu’elle est partie, donc loin de Mayers.

    - Exact.

    - Et tu es sûr qu’elle est assez loin de Mayers ?

    - Non. Comme je ne sais pas où elle est, je ne peux pas confirmer qu’elle est bien en sécurité.

     

    (68)

     

    - Et tu parles d’un détective privé ! C’est la base d’être capable de récupérer ce genre d’information Yann. Il va vraiment falloir que tu retournes à l’école de police. Acheter un billet d’avion ça laisse des traces sur un compte bancaire, sur des quais d’embarquement, partout.

    Yann râlait d’entendre Matt lui faire la leçon. Quand il prenait sa casquette de professeur de l’école de police, il devenait totalement ingérable, et pouvait parfois en oublier la réalité du terrain. Entre la théorie et la pratique, il y a un fossé parfois abyssal.

    - Paiement en liquide, fausse identité et heure de pointe. Voilà trois façons assez simples de camoufler ses traces. Je te rappelle que Thatch doit cacher sa femme de Mayers, et ce dernier connaît toutes les techniques pour disparaître des écrans radars. Il a déjà joué avec l’illégalité pour avancer sur le dossier de Mayers. Crois-moi, Thatch savait très bien comment faire pour faire disparaître sa femme. Et il l’a très bien fait.

    Matt allait pour s’exprimer pour rajouter une faille dans le plan de Yann, mais ce dernier leva la main aussitôt pour l’empêcher d’aller plus loin.

     

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    - Et oui, avant que tu me le précises, j’ai fait mettre ses appels sur écoute. Et pour l’instant, je n’ai rien. Je te le dis, il est rôdé. Il travaille pour le roi de la pègre, il a été à bonne école. Et même s’il n’est clairement pas de cet univers, il sait très bien s’en servir. Donc pour le moment, la piste est froide de ce côté-là. On va devoir trouver autre chose.

    - Et bien, justement j’ai autre chose, dit alors Matt.

    Il se leva alors, laissant ses deux comparses incrédules. Son principal atout dans cette affaire avait été sa capacité à filer Mayers, autrefois, et désormais, il laisser traîner ses oreilles un peu partout, sous couvert de ne plus être dans le système judiciaire. Mais cela faisait un moment que Matt revenait bredouille de ses sorties. Il continuait de rentrer tard, mais sans aucun résultat. Alors l’entendre annoncer qu’il avait du nouveau était quelque chose d’assez déroutant.

    Mathieu s’approcha alors de la fenêtre pour jeter un œil au dehors, et tint ses deux mains jointes dans son dos, dans une posture grave. Il ne mimait rien, car finalement ce qu’il allait leur annoncer n’avait rien d’anodin. Même pour lui. Il n’en avait parlé à personne, et surtout pas à Sienna. Il n’avait encore rien accepté, mais il ne pouvait pas le refuser.

     

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    - Mayers aurait développé un réseau de trafic d’armes dans le Vermont, et en communication directe avec Montréal. Il serait basé à Burlington, à distance raisonnable de la frontière canadienne. Et cette partie de la frontière est bien plus avantageuse que la nôtre et …

    - Attends, le coupa aussitôt Akira. Burlington ça n’a rien de nouveau pour Mayers. Il y a vingt ans il y avait déjà un pied. Et ça c’était mal fini pour lui, il en a perdu des hommes. Et tu crois vraiment que Mayers retournerait là-bas ? Ce n’était même pas les autorités qui avaient mis fin à ce trafic, mais une guerre de gangs frontaliers.

    - Je sais, je sais tout ça, soupira Matt. Mais les autorités du Vermont ont noté une forte croissance de trafic d’armes et de drogues depuis quatre ans…

    - Depuis la libération de Mayers, souffla alors Yann qui arrivait enfin à suivre. Tu ne trouves rien sur Mayers ici car il ne fait plus rien ici. Il se tient à carreaux et tout se passe deux états plus loin.

    - C’est ce que je pense aussi. C’est pour ça que je vais aller voir.

     

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    Akira et Yann protestèrent alors d’une seule voix face à l’annonce de Matt. Il n’était quand même pas sérieux ? Qu’il s’amuse à filer Mayers sur Houlton n’était pas un problème en soi, car il était chez lui, il avait ses contacts et connaissait la ville comme sa poche, et l’activité de Mayers y était moindre. Mais là-bas ? Là où la délinquance montait croissante ? Alors qu’il n’était rien de plus qu’un homme lambda désormais, et handicapé.

    - Mais tu n’as pas à y aller Mathieu, rétorqua Akira. Des hommes spécifiques vont être mis en place si c’est prouvé que l’activité a repris. Tu n’en tirerais rien.

    Mathieu soupira, et se tourna finalement vers eux. Son visage était fermé, mais quelque chose brillait dans son regard. Akira ne sut dire si c’était de l’excitation, de la joie ou de la peur. Sûrement un peu des trois.

     

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    - C’est moi qui vais contrôler les opérations de surveillance à Burlington. J’ai eu mon ordre d’affectation il y a une semaine, c’est officiel. Je dois donner ma réponse demain. Et j’irais.

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

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    Je ne suis déjà plus là à l'heure où vous lisez ces lignes ♥

    Coucou les gens ! J'espère que vous avez apprécié cette MaJ un peu choue, un peu ... Ouais ok, Matt a décidé d'avancer une bonne fois pour toute sur le dossier Mayers. Il fallait bien que quelqu'un s'y colle non ? Non ..? Oui, et bien tant pis, c'est Stevie qui s'y colle, nah !

    Et sinon, ce fut une MaJ un poil maudite ! Si je ne compte pas les erreurs fatales récurrentes que je peux avoir, celle-ci fut saupoudrée de bugs en tout genre concernant Emma & GK (corps rouges pétard avec les bras en croix, impossible de tenir la pose plus de 0.15 secondes avant de s'auto-reset ... J'ai cru que j'allais les tuer), Fraps qui a décidé de m'abandonner en cours de partie, et, le summum de la joie : une coupure de courant en plein tournage ! *O*
    Morale de l'histoire : ne pas couper les cheveux de Camille, où je sens que mon jeu va carrément s'autodétruire o_O

    Parmi les petites infos à faire tourner : les galeries de ParagraphesThis Is War et Don't Turn Around sont à jour (finally !). De même, les playlists Deezer des trois histoires sont aussi à jour, et les musiques rangées dans l'ordre. Suite à la mort de Flash, les lecteurs ne fonctionnent plus, donc vous avez au moins les chansons sur les playlists (quand elles existent sur Deezer) D'ici la prochaine MaJ, les musiques de Para et TIW (c'est déjà fait pour DTA) seront en lien cliquables directement sur les articles.

    Des bisous tout le monde, et à dans 15 jours pour la suite ♥

     

     

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    Cela faisait maintenant quelques jours que Xander et Robbie étaient revenus de leur petite escapade à Houlton. Et ils étaient maintenant chacun les dignes détenteurs des clés de leur futur appartement. Ils pouvaient aménager quand ils le souhaitaient, et à leur rythme. Robbie était donc déjà sur le pied de guerre, en train de transbahuter ses affaires, mais Xander prenait encore son temps. Nous n’étions qu’en juillet et il avait un peu moins de deux mois avant la rentrée. Sans compter que l’appartement était déjà meublé de l’essentiel : ramener trois tee-shirts et deux paires de chaussettes ne devrait pas être trop compliqué.

    Il avait actuellement d’autres soucis en tête, et il aimerait bien les résoudre avant de mettre les voiles et attaquer l’énigme de sa naissance. Le premier problème n’était pas le plus compliqué des deux, et il s’y dirigeait à grandes enjambées. Il savait très bien qu’il aurait une réponse avant la fin de la journée. Mais l’autre était plus difficile à résoudre. Et il s’agissait de Charlie. Depuis qu’elle avait rompu avec Xander par texto, il n’avait pas eu une seule nouvelle. Il avait bien évidemment essayé de la joindre le soir même, pour essayer d’avoir une explication avec elle, mais elle n’a jamais daigné répondre au téléphone. Et ça le vexait un peu.

    Il n’avait certes pas été le meilleur petit ami de la planète, ni le plus aimant, mais il aurait quand même cru qu’elle l’aimait ne serait-ce qu’un peu. Alors oui, c’était purement pour flatter son égo, mais il pensait vraiment que Charlie avait un peu plus de considération pour lui, comme lui en avait eu pour elle malgré tout. Mais rien, quedal. Il se retrouvait donc célibataire sans avoir eu la moindre possibilité de s’excuser pour son comportement.

    Sauf que Xander était quelqu’un de très obstiné, et qui aimait plutôt les petites boîtes, l’organisation, et le fait de faire les choses bien et dans l’ordre. Or, ce que faisait Charlie l’empêchait de terminer sa relation de la bonne façon. Et s’il n’arrivait pas à mettre un terme propre à l’ancienne, il ne voyait pas trop comment il pourrait en débuter une autre.

    Une autre relation. Cette fois-ci, y penser ne le faisait plus rougir comme il y a quelques semaines. Il avait fini par accepter cette part inattendue de lui. Du moins, il l’acceptait pour lui, mais il n’accepterait pas que cela se sache. Il savait qu’il était déjà un boulet pour ses parents depuis sa naissance, ce n’était pas la peine qu’il en rajoute une couche en ramenant un petit-ami. Alexis n’avait vraiment pas besoin de ça, il se faisait assez de mouron comme ça.

     

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    Il arriva ainsi devant l’immeuble où vivait Kellan. Ce dernier louait un appartement aux parents de Xander depuis plusieurs mois déjà. Xander connaissait très bien cet appartement, il venait régulièrement y faire le ménage avec ses parents entre deux locataires, mais il n’y était jamais rentré depuis que Kellan y vivait. Et cela lui rajouta une pression supplémentaire. Il avait décidé de venir, sans prévenir au préalable. Après tout, à chaque fois que Kellan était venu chez lui, c’était toujours à l’improviste, et il avait envie de lui rendre la pareille. D’un autre côté, si ça se trouve, il allait le surprendre alors qu’il était déjà avec quelqu’un. Après tout, ils ne se sont qu’embrassés, et Xander l’a repoussé à plusieurs reprises déjà. Ce ne serait pas étonnant que Kellan ait décidé d’abandonner ses vues sur Xander, pour les reporter ailleurs. Et dans ce cas-là, le brunet n’aurait plus qu’à s’en mordre les doigts ! Qui va à la chasse, perd sa place. Ou plutôt, celui qui décide de pas se bouger le cul se fait doubler par quelqu’un de bien moins indécis, et c’est bien fait ! 

    Il entra malgré tout d’un pas décidé dans l’immeuble, et prit directement les escaliers. Il savait qu’il n’aurait pas la patience d’attendre que l’ascenseur redescende s’il se trouvait au dernier étage. Et puis, l’appartement n’était qu’au deuxième, ce n’était pas insurmontable. Il ne s’arrêta finalement que devant la porte de l’appartement.

     

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    Il tendit malgré tout l’oreille. Il ne cherchait pas spécialement à savoir ce qu’il se passait dans cet appartement, mais plutôt s’assurer que Kellan était seul. Mais il n’entendit pas le moindre son, pas même un bruit de télévision ou un soupçon de musique. Rien, le calme plat, le néant. Il dormait ? Où il étudiait peut-être … Ce serait peut-être mal venu de le déranger, il ferait mieux de rentrer chez lui.

    - Non Xander, se dit-il à lui-même. Tu n’as pas fait tout ce chemin pour rentrer chez toi sans lui parler. Du courage.

    Il toqua à la porte, et attendit patiemment une réponse. Très patiemment. Trop patiemment. Kellan n’ouvrit pas la porte. Xander eut un petit pic de stress très intense en réalisant qu’il s’était peut-être trompé de porte, bien que ce soit impossible, il savait quand même où se trouvait l’appartement de ses parents. Et un petit coup d’œil sur la sonnette de celle-ci lui confirma bien que Kellan Stewart habitait ici. La sonnette, mais bien sûr ! Qu’il pouvait être bête. S’il était dans la mezzanine, il ne pouvait pas l’entendre toquer. Il appuya alors sur le bouton, et attendit de nouveau. Toujours rien. Il appuya une seconde fois. Pas le moindre signe de vie. Le voilà bien avancé.

    Kellan n’était pas là. Et il se retrouvait comme un con devant chez lui, tandis que sa motivation s’effritait au fur et à mesure que les secondes s’égrainaient. Il s’était pourtant enfin décidé à s’accepter, à accepter ce qu’il commençait à ressentir pour Kellan, et voilà que le destin lui faisait un magnifique pied de nez.

    - Et ça s’appelle le karma, bougonna-t-il en se dirigeant vers l’ascenseur.

    - Qu’est-ce qui s’appelle le karma ? lui demanda alors une voix en face de lui.

     

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    Xander releva le nez, et il vit Kellan devant lui, les bras chargés d’un sac de commissions. Il s’arrêta alors en plein milieu du couloir, et essaya de trouver une excuse pour sa présence dans le couloir de son immeuble en plein milieu de l’après-midi, mais rien de ce qu’il trouvait ne ferait l’affaire. En tout cas, hors de question pour Xander de parler de ses sentiments : sa motivation était complètement tombée à l’eau, et elle n’allait pas revenir de sitôt.

    - Euh, le karma ? C’est quand tu reçois le mal pour avoir fait le mal, expliqua-t-il.

    Kellan sourit, amusé.

    - Merci, mais je connais le principe du karma. Je demandais plutôt ce que tu avais eu comme retour de karma. C’est parce que tu espérais me trouver chez moi ? demanda-t-il en haussant un sourcil.

     

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    Xander fit la moue. Impossible de tenter de mentir avec Kellan, à chaque fois il tombait droit dans le mille.

    - Comment tu fais ? lui demanda alors le jeune homme aux yeux verts. 

    - Comment je fais ? Ah ! Pour lire dans tes pensées tu veux dire ? Je n’y peux pas grand-chose si tu es un livre ouvert Xan, répondit Kellan en haussant les épaules.

    Il s’approcha alors de sa porte d’entrée et la déverrouilla pour rentrer chez lui. Une fois dans la cuisine, il invita Xander d’un simple « allez entre, puisque t’es venu pour ça » et il posa son sac de course sur le comptoir. Xander s’exécuta, et il entra dans la cuisine de l’appartement avant de refermer la porte derrière lui.

     

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    L’appartement de Kellan était assez simple d’aménagement. Une cuisine qui servait également d’entrée, puis un long séjour-salle à manger qui faisait deux fois la taille de la cuisine. A l’étage, la chambre en mezzanine et la salle de bain. C’était un logement idéal pour un étudiant, et Xander avait tanné ses parents un nombre incalculable de fois pour s’installer ici  après le lycée afin de rejoindre son ami d’enfance, Emilien, qui vivait à Bloomington depuis quelques années déjà.

    - Tu veux boire quelque chose ? lui demanda Kellan, le sortant ainsi de ses pensées.

    - Ah, non, merci. 

    - Comme tu veux.

    Kellan se servit cependant une bière et il fila aussitôt dans son salon, entraînant Xander dans son sillage d’un signe de la main. Ce dernier s’exécuta, et prit place sur le canapé, aux côtés de Kellan. Il posa sa bouteille sur la petite table à côté de lui, et il se tourna vers Xander, sans un mot, attendant qu’il lui donne la raison de sa présence ici. Mais Xander regardait autour de lui, admirant la décoration du logement. Il ne l’avait jamais vu meublé, et l’espace revêtait un tout autre aspect.

     

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    - Allô la Lune ? Ici Kellan.

    Il bougea la main devant le visage du brunet, espérant ainsi attirer son attention. Xander cligna des yeux à plusieurs reprises, et redescendit sur Terre. Il secoua légèrement la tête, et remarqua que Kellan était tourné vers lui, un bras posé sur le canapé.

    - Donc, tu es ici parce que … débuta-t-il pour l’aider un peu.

    - Euh … débuta Xander, pris un peu au dépourvu. Parce que je voulais te parler. De quelque chose.

    - Je t’écoute.

    Il l’encouragea d’un petit mouvement de la main, et Xander baissa le regard. Il n’avait vraiment plus la motivation nécessaire pour lui faire une déclaration. Il allait devoir trouver autre chose.

    - J’ai cassé avec Charlie. Enfin, elle m’a largué. Parce que je lui ai dit qu’on devait parler. Bref, je suis plus avec elle.

    - Oh.

    Kellan écarquilla les yeux, et se retint d’esquisser ce petit sourire qui essayait de se glisser sur son visage. Ce n’était pas le moment d’avoir une tête heureuse alors que son ami venait de lui annoncer qu’il venait de se faire jeter. Mais Xander avait bien vu le début de sourire sur le visage de Kellan, et il lui sourit en retour.

     

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    - Tu peux sourire. C’est toi qui m’avais dit de le faire. 

    - Très bien, tu l’auras voulu, dit-il en laissant s’afficher son sourire. Mais ça a été quand même ? Elle ne t’a pas fait de scène ?

    - J’en sais rien, dit Xander en haussant les épaules. Elle m’a envoyé un texto, et je n’arrive pas à la joindre depuis.

    - Je suis désolé pour toi, lui dit finalement Kellan.

    Xander tourna la tête vers lui, avec un regard suspicieux.

    - T’es désolé de rien du tout. Ça t’arrange plutôt.

    Kellan eut un petit rire. Ce n’était pas souvent qu’il entendait Xander parler franchement et sans limiter ses mots. Ça arrivait certes de plus en plus souvent, par échange de message notamment, mais à l’oral ça restait encore assez rare pour qu’il l’apprécie d’autant plus.

     

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    - En effet, répondit-il. Ce n’est pas pour me déplaire. Mais comme je sais qu’il n’en est pas question pour toi, ça ne me change pas grand-chose de le savoir. N’est-ce pas ?

    Il planta son regard dans celui de Xander, attendant la réponse de son interlocuteur. Il espérait ne pas faire fausse route cette fois-ci en interprétant les expressions de Xander. Mais il ne se lancerait pas de lui-même. Après tout, lui n’a rien à prouver à Xander. Il lui a déjà tout dit, et joué carte sur table. Il savait donc que ça ne servirait à rien qu’il lui répète une nouvelle fois qu’il lui plaisait, et pas qu’un peu. Si leur amitié devait évoluer, c’était à Xander de faire le premier pas cette fois. 

    - N’est-ce pas ? répéta-t-il quand il constata que Xander ne lui répondait pas.

    - Et … si ça changeait quelque chose ? lui dit-il finalement à voix basse.

    Il rougit aussitôt quand il réalisa qu’il venait de tendre une perche à Kellan. 

     

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    Ce n’était certes pas la perche la plus évidente de l’histoire des perches, mais elle était là quand même, et assez gênante pour que Xander perde tout aplomb. Il prit alors une grande respiration : il avait commencé, il n’avait plus qu’à continuer. Il ne pouvait pas laisser cette discussion en suspens. Il a lu dans un livre un jour qu’il suffisait de trente secondes de courage pour changer de vie. Alors il avait intérêt à les saisir là maintenant, et tout de suite.

    Il releva alors la tête, rouge cramoisi et accrocha son regarda aux yeux bleus de Kellan.

    - Pour moi ça change quelque chose. Parce que ça fait des mois que je n’arrive pas à te sortir de ma tête. Et tant que j’avais Charlie, je n’y prêtais pas attention. Ou si. Mais je ne voulais pas y faire attention. Parce que je suis assez hors norme pour en rajouter une couche. Je ne pouvais pas, je ne peux pas, me permettre de compliquer encore plus ma vie. Mais là, je … je m’en fous si ma vie se complique. Parce que finalement, je n’ai plus ni Charlie, ni cette histoire qui me bouffait parce que je n’y comprenais rien.

    Il débitait ses paroles dans un flot continu, prenant sur lui pour aligner plus que trois mots, pour parler de ce qu’il ressentait. Mais Kellan avait un peu de mal à suivre tout ce discours, et il lui prit assez rapidement les mains pour l’empêcher de parler une seconde de plus. 

     

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    - Attends deux minutes. Comment ça « tu es assez hors normes pour en rajouter une couche » ? De quoi tu parles ? Je t’ai déjà dit qu’aimer les mecs ne faisait pas de toi quelqu’un d’anormal.

    - Je sais, dit aussitôt Xander avec véhémence. Mais …

    - Mais ? 

    - Je suis adopté, et je ne suis même pas sûr de te l’avoir dit. Mes parents m’ont adopté quand j’avais quelques mois. Ma mère adoptive, ce n’est pas Zélie. Elle est ma belle-mère. Ma mère s’appelait Sarah, et elle morte d’un cancer quand j’avais cinq ans. Mon père ne s’en est jamais vraiment remis. Mais je suis aussi très malade. Le cœur, les poumons, les reins … pratiquement tout déraille chez moi. C’est de naissance, mais on ne sait pas si c’est héréditaire ou juste congénital. Mais c’est là. Et je peux pas rajouter « ça » - il indiqua alors Kellan et lui-même de ses mains – à mon père. Il s’inquiète déjà assez pour moi.

    Le blond resta stoïque un moment. Il ne connaissait absolument pas toute cette histoire au sujet de Xander, et il se sentait plutôt flatté qu’il le partage avec lui, tout en étant profondément attristé de tout ce qu’il lui arrivait. Et il comprenait son point de vue, même s’il avait du mal à poser lui-même les mots dessus. Faire son coming-out n’était jamais quelque chose de facile, ni pour celui qui le faisait, ni pour ceux qui l’écoutaient. Sans compter les « qu’en dira-t-on » de tous ceux qui voulaient absolument partager la débilité de leurs conneries homophobes. Il acquiesça alors et resserra doucement ses mains sur celles de Xander.

     

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    - C’est bon, j’ai compris. Pas la peine d’en dire plus si tu ne veux pas. Je ne vais pas te forcer à quoi que ce soit Xander. On peut juste rester amis, et moi ça me va très bien tu sais.

    Xander détourna le regard, mais malgré sa gêne palpable n’enleva pas ses mains de l’étreinte de celle de Kellan.

    - Mais moi j’ai pas envie qu’on reste juste amis.

    Il regarda de nouveau Kellan, et la réaction de celui-ci lui fit plaisir. Il avait obtenu l’effet de surprise qu’il escomptait. Kellan avait eu un temps d’arrêt, les yeux légèrement écarquillés et il avait même réussi à lui faire légèrement rougir les oreilles.

    - Tu veux qu’on sorte ensemble ? dit alors Kellan de but en blanc.

    Autant être direct et cesser de tourner autour du pot. Au bout d’un moment, Kellan avait besoin que les choses soient dites clairement, et il pensait d’ailleurs que cela devait être la même chose pour Xander, vu son affection toute particulière pour le “bien fait”.

    - Oui, dit-il timidement. Enfin, si t’as personne et que c’est toujours d’actualité pour toi.

     

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    - Et bien, dit-il très sérieusement. Je n’ai personne et oui, tu me plais toujours.

    Xander esquissa un sourire, et il sentit ses joues se calmer, et perdre quelques teintes de rouge. Il avait également l’impression que son cœur était beaucoup plus léger tout d’un coup. Comme si un poids qu’il portait depuis des mois venait enfin de s’envoler : il ne s’était jamais senti aussi bien.

    Kellan s’approcha alors doucement de Xander, remontant une main sur la nuque du jeune homme, et posa son front contre le sien. Xander leva légèrement les yeux pour croiser ceux de Kellan. Il avait envie de l’embrasser, mais il voulait lui demander une dernière chose avant. Kellan remarqua bien la question sous-jacente de Xander, et il n’eut pas besoin de lui demander de la formuler à voix haute.

    - Promis, on garde ça pour nous pour le moment.

     

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    Xander murmura un merci, et il glissa ses bras autour de la nuque de Kellan pour se rapprocher plus de lui encore, et comme lors de leur premier baiser, c’est lui qui fit le premier pas et qui l’embrassa. Sauf que cette fois-ci, il n’était pas juste question d’essayer pour voir. Parce qu’il était sûr de lui : il était tombé amoureux de Kellan, et cette perspective lui faisait battre le cœur à deux cents à l’heure.